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Comment les pucerons
manipulent les plantes
Les pucerons ingèrent la sève alors qu’elle circule dans les vaisseaux du
phloème, grâce à des pièces buccales modifiées en stylets souples percés
d'un canal alimentaire et d'un canal salivaire. Ce dernier leur permet
d'injecter dans les tissus végétaux des sécrétions salivaires jouant un rôle
fondamental dans la recherche, l’acceptation et la manipulation
physiologique des tissus cibles.
Philippe Giordanengo*, Gérard Febvay**, Yvan Rahbé**
* EA3900 Biologie des plantes
et contrôle des insectes
ravageurs, université
de Picardie Jules Vernes,
F-80039, Amiens
philippe.giordanengo@
u-picardie.fr
** UMR203 Biologie
fonctionnelle insectes
et interactions, IFR41,
Inra, Insa-Lyon,
F-69621 Villeurbanne
L
e phloème est un tissu vivant dont les éléments
fonctionnels majeurs sont les cellules des tubes
criblés, qui transportent les produits de la
photosynthèse. Ils constituent donc une manne
métabolique pour qui saura les localiser et les exploiter durablement de manière concurrentielle par rapport aux autres tissus de la plante (racines, fruits,
méristèmes…).
Les caractéristiques majeures de la sève phloémienne,
qui façonnent l’ensemble des adaptations métaboliques
des pucerons, sont les suivantes :
• c’est un fluide intracellulaire, particularité rare pour
l’aliment exclusif d’un animal, les herbivores s’alimentant généralement aux dépens des tissus et
organes des plantes. Outre les conséquences en termes
de composition, la structure de ce tissu nourricier
induit de fortes contraintes quant à la taille des pièces
buccales, et donc de l’animal. Par ailleurs, les conséquences de la quasi-stérilité de cet aliment sont évolutivement importantes ;
• c’est un milieu généralement pauvre en protéines.
Il en découle une importance très secondaire de la
digestion protéique, et en retour une sensibilité potentielle de ces insectes aux toxines protéiques ;
• c’est un milieu subissant de grandes variations
compositionnelles, d’origine physique (lumière,
saison…) ou physiologique (stade végétatif, position architecturale…) ;
© PLATE-FORME MICROSCOPIQUE/UNIV. PICARDIE
Un pipeline alléchant
,
Pour étudier les différentes étapes conduisant à la prise alimentaire, une électrode pénétrographique (EPG) est collée
sur le dos du puceron.
Électrode (fil d'or de 20 µm de diamètre)
Glue argentique
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Dossier Pucerons, les connaître pour mieux les combattre
J Exp Bot 57, 747-54
(2) Powell G et al. (2006)
Annu Rev Entomol 51, 309-30
(3) Rahbé Y et al. (2000)
pp. 212-236 (Walker, G.P.
et al., Eds.) Thomas Say
Publ., USA
(4) Chen JQ et al. (1997)
Eur J Plant Pathol 103, 521-36
(5) Kaloshian I, Walling LL
(2005) Annu Rev
Phytopathol 43, 491-521
Un comportement alimentaire évolué
et complexe
Le puceron insère ses stylets dans les tissus végétaux
et les fait pénétrer entre les cellules jusqu’à atteindre
le phloème. Au cours de ce transit, il réalise diverses
activités et prélèvements extracellulaires, mais également des ponctions intracellulaires dans des tissus non nourriciers. Ces prélèvements, qui
s’accompagnent toujours d’une injection de salive,
sont déterminants dans le choix de la plante hôte (2),
ainsi que pour la localisation des stylets dans les
tissus végétaux.
Les cellules bordant les vaisseaux phloémiens sont
plus ponctionnées que celles des autres tissus, indiquant une recherche du phloème par échantillonnage
et la capacité de l'insecte à reconnaître la composition
chimique des différents types cellulaires rencontrés.
Durant cette phase, les organes de l’épipharynx situés
dans la cavité buccale jouent un rôle fondamental dans
la perception gustative. Les principaux stimuli potentiels d’identification du phloème sont le pH, la teneur
en certains sucres et acides aminés, ainsi que le potentiel redox (résultant de la réactivité des composés
chimiques en présence) (3).
Ces différentes phases aboutissant à la prise alimentaire des pucerons ont été étudiées par des techniques
analytiques ou comportementales dédiées, comme
la stylectomie (coupure des stylets pour la récolte de
sève) ou l’électropénétrographie (EPG, figure 1). Elles
permettent, par exemple, de bien comprendre les
modes de transmission des virus aux végétaux et le
rôle de certaines résistances génétiques des plantes
dans les mécanismes de leur colonisation par ces ravageurs (4, 5). L’importance économique des pucerons
repose en partie sur cette étape de sélection de la plante
hôte (voir pp. 22 et 40), comme sur leur exceptionnel
potentiel reproducteur (voir pp. 49 et 53).
Figure 1
Exemples de graphes d’EPG
(électropénétrographie)
Cette technique mise au point par DL McLean,
MG Kinsey (USA) et WF Tjallingii (Pays-Bas)
permet de suivre les activités alimentaires des
pucerons in situ. En bleu, un enregistrement
global, analogue à ce que pourrait donner un
électrocardiogramme pour les activités électriques du cœur humain.
Au centre, une coupe transversale de feuille,
avec l’emplacement des stylets et des liens sur
les vues élargies des ondes enregistrées à chacune de ces localisations. Les ondes « C »
constituent les trajets extracellulaires, les « E »
signent l’alimentation phloémienne et les « pd »
(pour potential drop, ou chute de potentiel)
accompagnent le franchissement d’une membrane cellulaire en activité. En vert sont représentées des activités normales, en rouge des
activités signalant des stress locaux, mécaniques (F) ou trophiques (G).
(d’après Sauvion, 1996, thèse Insa-Lyon,
http://docinsa.insa-lyon.fr/these/pont.php?
id=sauvion)
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© DR
(1) ) Douglas AE (2006)
• c’est un milieu de transport extrêmement riche
en sucres (source non limitante de carbone
et d’énergie). Cette caractéristique rappelle celle
des fruits et des nectars (1) , même si elle en est
écologiquement très différente (faible accessibilité
et relation plante-insecte antagoniste). Cette ponction à la source du carbone photosynthétique
pose des problèmes majeurs de compatibilité
physiologique (gestion de l’eau et des composés
dissous) ;
• c’est un milieu éventuellement riche mais très déséquilibré en acides aminés et particulièrement limité
en acides aminés essentiels non synthétisables par les
animaux. Cette contrainte, aux conséquences métaboliques fortes, restreint l’utilisation de cette source
trophique aux insectes disposant d’une flore microbienne symbiotique pouvant complémenter cette
déficience ;
• c’est enfin un milieu quasi exempt de lipides, dont
certains sont également essentiels pour les cellules
animales. Contrairement au cas de la gestion de
l’azote, les pucerons semblent avoir trouvé par euxmêmes la solution aux problèmes biosynthétiques
posés par les lipides et les pigments qui y sont apparentés (aphines polycycliques responsables de certaines de leurs couleurs prononcées, hors spectre
jaune couvert par des caroténoïdes). Leur stricte
dépendance vis-à-vis de certains composés végétaux
(stérols) pour la synthèse de leurs hormones impliquées dans les processus de croissance et de développement (mues) des larves (stades de
développement après l’éclosion de l’œuf qui donnent l’adulte), reste cependant un mystère non
résolu…
Chacune de ces caractéristiques constitue une barrière évolutive importante que les pucerons ont su
lever, seuls ou avec l’aide de partenaires microbiens
(voir p. 49).
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Des insectes « furtifs »
D’un point de vue évolutif, et contrairement à de nombreux insectes ayant une stratégie de « prédateurs »
vis-à-vis des plantes, les pucerons, ainsi que les autres
insectes phloémophages (cochenilles, aleurodes ou
« mouches blanches », psylles…), sont des parasites (5)
adoptant une stratégie de furtivité. L’enjeu est de ne
pas affronter les principaux mécanismes de défense
développés par les plantes pour se protéger, qu’ils soient
constitutifs (certains composés toxiques) et s’expriment quel que soit l’état de la plante, ou induits par
les blessures cellulaires et les sécrétions diverses occasionnées lors de la prise alimentaire.
Cependant, nous verrons qu’une interaction très particulière s’établit entre la plante et le puceron qui semble
être significativement différente de celles engendrées
par d’autres insectes. Comme toujours en biologie, des
exceptions à cette furtivité existent, et la salive des
pucerons peut provoquer des toxémies ou des galles
chez certaines plantes (voir p. 22).
Contexte génétique
de compatibilité
Alimentation
puceron
?
Contexte génétique
de résistance
?
Reconnaissance de l'acte alimentaire
par dommages spécifiques des pucerons
(parois, cellules ponctionnées, phloème)
?
Reconnaissance de l'acte alimentaire
par interaction de type gène-à-gène
degré variable de spécificité taxonomique
Formation de la signalisation des réactions de défense de la plante
gradient d'intensité, résistances +/- fortes
O2 + acide α-linolénique
ABA, GA
SA
ET
NO
peroxydes d'acides gras
Calcium
H2O2, ROS
signalisation
phloème-spécifique
acide 12-oxodécanoïque
acide 12-oxo-phytodiénoïque
(OPDA)
dégâts oxydatifs directs
des pucerons
Les réponses de la plante à l'infestation
acide jasmonique
(JA, MeJA)
Protéines PR
Le phloème réagit localement
Le phloème, quant à lui, contient de nombreuses
protéines phloémiennes (protéines P) intervenant
dans le colmatage des blessures de ce tissu. De la
callose peut également se déposer après plusieurs
minutes et obstruer les vaisseaux, ralentissant fortement le flux de sève et empêchant la prise alimentaire des pucerons. L’insertion des stylets dans
des cellules phloémiennes pauvres en calcium s’accompagne au point d’insertion d’un influx de calcium (figure 2), amplifié par l’induction des canaux
calciques facilitant le passage de l’ion à travers la
membrane (8).
Cet influx calcique peut initier des cascades de signalisation à longue distance et ainsi réguler la réponse
systémique de la plante (réponse généralisée à la
gradient d'intensité ± spécifique anti-pucerons
Défenses chimiques spécifiques des insectes (et/ou des pucerons)
© DR
Le puceron et la plante se reconnaissent très vite
Dès l’insertion de leurs stylets dans les tissus végétaux,
les pucerons effectuent des prélèvements de contenu
tissulaire qui leur permettent d’identifier les propriétés physico-chimiques de la plante et d’évaluer ainsi sa
compatibilité alimentaire. La première couche cellulaire est ponctionnée, ainsi que les cellules bordant
le trajet vers le phloème, tout comme les fluides du
compartiment intercellulaire. Selon l’espèce de puceron et la gamme de plantes susceptibles de l’héberger (souvent très restreinte, parfois très large pour
les espèces d’importance agronomique), les stimuli de
poursuite de l’exploration alimentaire se situent à ces
différents niveaux (temps de réaction allant de la minute
à quelques heures).
À l’inverse, les activités des stylets durant la recherche
du phloème (salivations extra- et intracellulaires, ponctions cellulaires) peuvent induire des réactions de la
plante dans les quelques minutes suivant la piqûre.
C’est le cas de melons exprimant un gène de défense
(Vat) (6, 7) sur lesquels les pucerons présentent des comportements alimentaires très perturbés, conduisant
finalement à l’abandon de la plante après l’atteinte du
phloème (4).
Gènes R (Vat, Mi, Rm, Akr...)
degré variable de spécificité botanique (arsenal toxique plante) ou de cibles (sensibilité de l'insecte)
Figure 2 Voies de signalisations déclenchées
chez les plantes par des agressions d’insectes
phloémophages tels que les pucerons
Les métabolites clefs de signalisation figurent en noir (SA :
acide salicylique ; ET : éthylène ; NO : oxyde nitrique ; ABA :
acide abscissique ; GA : acide gibbérellique ; ROS : espèces
réactives de l’oxygène ; MeJA : ester méthylique de l’acide
jasmonique). Certains gènes de résistance (« gènes R »)
contrôlant le déclenchement des cascades de défenses sont
mentionnés en vert.
Les points d’interrogation symbolisent des inconnues ou la
non caractérisation d’une voie (d’après Smith et Boyko, 2007,
doi://10.1111/j.1570-7458.2006.00503.x).
plante entière). Chez les Fabacées, les forisomes, des
structures protéiques très sensibles à l’arrivée de calcium, s’y lient pour former de très grosses structures
protéiques capables d’obturer les tubes criblés, stoppant immédiatement le flux de nutriments. Chez
d’autres espèces végétales, la capacité des protéines P
à se lier au calcium n’a pas été démontrée, excepté
pour certaines enzymes (protéines kinases) (9) . Il
est cependant très probable que la signalisation calcique associée à la balance redox et aux molécules
d’oxygène réactives (H 2O 2, OH - …) soient les éléments majeurs contrôlant réponse et tolérance des
cellules du phloème à l’alimentation des pucerons (8).
L’influx de Ca ++ a également un effet direct sur la
production de callose, polymère glucidique (1,3-βglucane, également majoritaire dans la paroi cellulaire des champignons) qui est impliqué dans la
défense à la blessure, et synthétisé par une enzyme
régulée par le calcium.
BIOFUTUR 279 • JUILLET-AOÛT 2007 37
(6) Silberstein L et al. (2003)
Genome 46, 761-73
(7) Dogimont C et al. (2003)
Gène de résistance à
Aphis gossypii. FR 0300287
(Inra, brevet)
(8) Will T et al. (2007)
PNAS, doi: 10.1073/pnas.
0703535104
(9) Yoo BC et al. (2002)
J Biol Chem 277, 15325-32
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Dossier Pucerons, les connaître pour mieux les combattre
Puceron
La manipulation de la plante
par les pucerons
Phloème
Plante
Épiderme
Rostre
3
4
1
2
Cellule Tube criblé
compagne
1
salive extracellulaire de la gaine
2
salive de piqure intracellulaire
3
salive intracellulaire phloémienne
4
salive liquide réingérée
Figure 3 Les quatre salives des pucerons
détectées par EPG
Une salive gélifiante extracellulaire (cercle plein) et trois
salives liquides injectées dans les cellules (cercles vides).
Seule l’une d’entre elles possède une fonction digestive
potentielle (4) (d’après Tjallingii WF, 2006).
(10) Moran PJ, Thompson
GA (2001) Plant Physiol 125,
1074-85
(11) Thompson GA, Goggin FL
(2006) J Exp Bot 57,
755-66
(12) Divol F et al. (2005)
Plant Mol Biol 57, 517-40
(13) Kehr J (2006) J Exp Bot
57, 767-74
(14) Sauge MH et al. (2006)
Oikos 113, 305-313
(15) Miles PW (1999)
Biol Rev 74, 41-85
(16) Cherqui A, Tjallingii WF
(2000) J Insect Physiol 46,
1177-86
(17) Tjallingii WF (2006)
J Exp Bot 57, 739-45,
doi://10.1093/jxb/erj088
(18) Girousse C et al. (2003)
New Phytologist 157, 83-92
La plante réagit globalement
L’insertion des stylets s’accompagne également de la
libération dans le phloème de molécules d’oxygène
réactives (10 à 12) responsables de l'induction d'une
réponse de défense systémique et spécifique, et ce
patron de réaction semble s’appliquer à toutes les dicotylédones (13).
L’attaque par un insecte phytophage de type brouteur,
qui prélève des portions de feuille ou de tige, se traduit
par une activation des voies jasmonates/éthylène, conduisant à la production et à l’accumulation de nombreuses
protéines ou de composés secondaires (inhibiteurs de
protéases, polyphénoloxydases, peroxydases, phénylpropanoïdes…). En revanche, l’attaque par un pathogène (virus, bactérie ou champignon) s’accompagne
de la production de radicaux oxygénés actifs et induit
les voies de signalisation du salicylate. Elle conduit également à la production locale ou systémique de « pathogenesis-related proteins » (protéines PR), et s’accompagne
dans certains contextes génétiques de réactions d’hypersensibilité, incluant un syndrome de mort cellulaire programmée qui limite l’extension de l’infection.
Par comparaison aux deux réactions précédentes, l’agression par les pucerons peut activer partiellement les deux
voies de signalisation décrites (figure 2), mais privilégie
la voie salicylate, se traduisant par la production de protéines PR (10), avec cependant de nombreux cas d’hypersensibilité sous contrôle génétique simple (14). En plus de
l’implication majeure de l’une de ces deux voies canoniques, d’autres gènes activés montrent une réponse
systémique spécifique au compartiment phloémien de la
plante (12). Ainsi, malgré la similitude avec la réponse aux
pathogènes, l’agression aphidienne semble induire chez
la plante une réponse spécifique qui reste à déchiffrer.
Sensibles à divers effecteurs de la voie des jasmonate/éthylène, comme certaines enzymes ou inhibiteurs de protéases, les pucerons tentent d’en limiter l’induction.
38 BIOFUTUR 279 • JUILLET-AOÛT 2007
© DR
Stylets
Contournement des défenses induites
Lors des phases de piqûre de sondage et de pénétration
dans le phloème, les pucerons relarguent plusieurs types
de salive (figure 3) jouant un rôle fondamental dans l’acceptation de la plante hôte (15, 16). À la surface de la
plante, les pucerons déposent une petite quantité de
salive gélifiante ; cette salive, sécrétée ensuite en continu
lors du cheminement des stylets entre les cellules, forme
une gaine qui isole ces derniers des tissus de la plante.
Outre un hypothétique rôle mécanique, cette gaine joue
un rôle de barrière chimique limitant les flux calciques
transmembranaires impliqués dans la réponse rapide
des plantes à la pénétration des stylets dans les vaisseaux
phloémiens (8), mais probablement également aux espèces
réactives de l’oxygène.
La salive liquide constitue le deuxième type de salive
produit par les pucerons. Lorsqu’un puceron effectue
une ponction, par exemple de sève élaborée, il injecte
en premier lieu de la salive liquide dans les vaisseaux du
phloème. À cet instant, la valve du canal alimentaire se
ferme, empêchant l’ingestion de sève (17). La salive liquide
joue une part importante dans le contournement des
défenses immédiates de la cellule végétale. Elle pourrait
se lier au calcium ou à l’oxygène actif, inhibant ainsi
leur rôle dans la coagulation des protéines phloémiennes
ou les dépôts de callose. Elle pourrait également inhiber directement la coagulation des protéines phloémiennes ou même hydrolyser la callose (8). Une fonction
digestive est par ailleurs soupçonnée pour cette salive,
car une fraction du flux sécrété dans la cellule phloémienne est vraisemblablement ingérée par l’insecte via
le flux alimentaire entrant (17) (figure 3).
Altérations métaboliques
Afin de compenser en partie les carences compositionnelles de la sève phloémienne, les pucerons sont
capables d'accroître le flux de phloème, mais aussi d'induire une augmentation systémique des taux d'acides
aminés circulants, dont les acides aminés essentiels. En
outre, ils semblent également capables d’induire une
accumulation phloémienne locale de glucides, aux
dépens des autres tissus de la plante (18). Cette manipulation trophique se manifeste de façon exacerbée
dans le cas des pucerons galligènes, étudiés depuis longtemps pour leur manipulation locale et systémique de
la signalisation hormonale de l’hôte.
Parce qu’ils s’alimentent exclusivement aux dépens de
la sève élaborée des plantes, les pucerons ont développé
tout un arsenal d’adaptations tant morphologiques
que physiologiques leur permettant d’exploiter cette
ressource trophique difficilement accessible, aux propriétés physico-chimiques très particulières et siège de
l’expression des mécanismes de résistance systémique
induite (distribution des signaux de défense à l’échelle
de la plante). Du fait de l’intimité de cette interaction,
le modèle puceron-plante constitue un exemple maintenant bien étudié de coévolution plante-insecte. Pour en savoir plus
www.biocel.versailles.inra.fr/phloem/index.html
http://jxb.oxfordjournals.org/content/vol57/issue4
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