Séquence 3 – Démocraties fragilisées et expériences totalitaires dans l’entre-deux-guerres (1918-1939) Dans l’entre-deux-guerres, des régimes politiques d’un type nouveau apparaissent dans plusieurs Etats européens fragilisés par la Première Guerre mondiale : les régimes totalitaires. La situation de crise sociale, politique et économique favorise cette prise du pouvoir par des dirigeants autoritaires. Ainsi apparaissent le stalinisme dans l’URSS communiste sous Staline, le fascisme en Italie sous Mussolini, et le nazisme en Allemagne sous Hitler. Ces trois régimes n’ont pas tous les mêmes fondements idéologiques. Cependant, ils présentent des caractéristiques communes : l’exercice du pouvoir par un parti unique dirigé par un chef toutpuissant, le recours à la propagande, le contrôle de l’économie et l’usage de la terreur. Antidémocratiques par nature, les régimes totalitaires et autoritaires bouleversent l’ordre européen dans les années 1930 (carte p.60). Pendant ce temps, les démocraties européennes ne réagissent pas, facilitant la préparation de la guerre. En étudiant cette période, nous nous demanderons comment les régimes totalitaires menacent les démocraties dans l’Europe de l’entre-deux-guerres ? I. Ressemblances et différences : l’avènement des régimes totalitaires Dans l’entre-deux-guerres des régimes totalitaires apparaissent en Russie et en Allemagne. Les conditions de leur installation présentent des similitudes, mais leurs idéologies diffèrent. A. Une situation de crise favorise l’arrivée au pouvoir Un coup d’État en Russie. En février 1917, les défaites militaires de la Russie face à l’Allemagne provoquent une révolution. Le tsar Nicolas II est chassé du pouvoir. Un gouvernement provisoire est formé, mais il ne parvient pas à sortir le pays de la crise. En octobre, une seconde révolution porte Lénine et les bolcheviks au pouvoir. Rapidement, une guerre civile éclate entre les « Rouges » (communistes) et les « Blancs » (partisans du tsar). Les bolcheviks l’emportent et fondent l’Union des républiques socialistes soviétiques (URSS). En Allemagne, la situation est différente. À la sortie de la guerre, la République de Weimar est fragilisée par des difficultés économiques et l’humiliation du Diktat de Versailles. La crise boursière de 1929 provoque un chômage de masse (6 millions de chômeurs en 1932 - p.64), entraînant une agitation sociale. Les nazis profitent de celle-ci pour se présenter comme les garants de l’ordre (doc.3, p.64). Aux élections législatives de 1932, le NSDAP arrive en tête aux élections, permettant à Hitler d’être nommé chancelier le 30 janvier 1933. Il s’impose ainsi démocratiquement, avant de mettre en place un régime totalitaire. B. L’engrenage totalitaire se met en place … En URSS, à la mort de Lénine en 1924, Staline se présente comme son héritier. Après avoir éliminé ses principaux rivaux au sein du Parti, il s’impose comme l’homme fort du régime. Dès lors, il instaure un pouvoir personnel et totalitaire, collectivise l’économie et supprime les libertés (doc.3 et 5, p.62-63). Collectivisation : mise en commun des terres agricoles En Allemagne. Le 27 février 1933, les nazis incendient le Reichstag et accusent les communistes d’avoir commis ce crime (p.65). L’état d’urgence est décrété et, le 23 mars, le Parlement accorde les pleins pouvoirs à Hitler. Il destitue les fonctionnaires juifs ou jugés hostiles au nazisme et interdit les syndicats et les partis à l’exception du NSDAP. Après le décès du président Hindenburg en août 1934, Hitler prend tous les pouvoirs et instaure un régime totalitaire. En moins de deux ans, il a ainsi réalisé la « mise au pas » de l’Allemagne. Avec les lois de Nuremberg en 1935, l’Allemagne devient une dictature raciste et antisémite (doc.6, p.65). Nazisme : idéologie raciste, antisémite, agressive et totalitaire élaborée par Hitler NSDAP : parti national-socialiste des travailleurs allemands (parti nazi) Reichstag : parlement allemand En URSS et en Allemagne, les moyens d’information sont contrôlés par l’Etat. La propagande cultive le culte de la personnalité (Führer). Dès leur plus jeune âge, les enfants sont embrigadés dans des organisations de jeunesse. Toute opposition au parti est interdite et les opposants sont traqués et déportés (camp de concentration en Allemagne, goulag en URSS) (Dossier p.66-67). Culte de la personnalité : pratiques diverses (éloges, portraits …) qui poussent à considérer un homme comme un héros/sauveur Führer : titre par lequel Hitler se faisait appeler « Le Guide » Embrigadement : contrôle de la pensée et des opinions par la propagande et l’éducation. Goulag : camp de travail forcé où sont envoyés tous les opposants à la politique de Staline. C. … sur des fondements idéologiques différents L’idéal soviétique : le communisme. Le régime bolchevik se fonde sur l’idéologie marxiste, qui prône l’idée d’une société égalitaire fondée sur la propriété collective des moyens de production. Au XIXe siècle, le philosophe allemand Karl Marx prévoyait qu’une société communiste, c’est-à-dire sans classes sociales et sans État, serait mise en place après une révolution anti-bourgeoise et une période de dictature du prolétariat (doc.1, p.62). Après la révolution d’Octobre 1917, les bolcheviks abolissent la propriété privée, mais cela suscite l’hostilité des paysans et désorganise l’économie. En 1928, Staline décide d’accélérer la collectivisation des campagnes et la planification de la production industrielle (plan quinquennal - p.63). Ce « Grand tournant », loin de les mener vers le communisme, renforce l’autorité de l’État sur les masses. Le nazisme : la domination de la race aryenne. Dans un livre rédigé en prison entre 1924 et 1925, intitulé Mein Kampf (« Mon Combat »), Hitler théorise la supériorité de la race aryenne. Au nom de cette idéologie, une politique antisémite est mise en place : les magasins juifs sont boycottés et les juifs sont marginalisés par les lois de Nuremberg (1935). Par ailleurs, Hitler souhaite conquérir un vaste territoire, appelé espace vital (Lebensraum), pour assurer la prospérité d’un État réunissant toutes les populations germanophones : la Grande Allemagne. Bien que ces fondements idéologiques divergent, ce sont des régimes totalitaires avec à leur tête un chef tout-puissant. Les sociétés sont encadrées pour forger un « homme nouveau » : les jeunes sont endoctrinés et la propagande est plus forte que jamais (Dossier p.68-69). Quant à la terreur, elle s’exerce par la surveillance et la répression grâce à des polices qui n’hésitent pas à tuer les opposants potentiels : le NKVD en URSS et la Gestapo en Allemagne. En URSS, 750 000 citoyens sont exécutés lors de la Grande Terreur (1936-1937) et 15 millions de personnes détenues entre 1917 et 1953. En Allemagne, 1 million de juifs, opposants politiques et homosexuels sont fait prisonniers entre 1933 et 1939. Antisémitisme : haine envers les juifs Aryen : race inventée par les théoriciens racistes, d’où seraient issus les Allemands. Elle est considérée par les nazis comme pure et supérieure. Camp de concentration :camps où sont enfermés, des opposants politiques, des groupes ethniques ou religieux, sans jugement et dans des conditions inhumaines II. Les résistances des démocraties En France, comme au Royaume-Uni, les Etats font face à la montée des partis d’extrême droite. La crise économique des années 1930 fait augmenter le chômage et les gouvernements, trop instables, sont impuissants. Résultat, de nombreuses voix s’élèvent contre la IIIe République qui est critiquée pour son instabilité et des scandales de corruption. Au même moment, les ligues - mouvements d’extrême droite violents, racistes, xénophobes, antisémites et antiparlementaires - progressent et menacent la démocratie comme lors de l’émeute du 6 février 1934 devant l’Assemblée nationale. Face à cette menace fasciste (doc.1 p.70), les partis de gauche s’unissent en 1935 (doc.2 p.70) : c’est la naissance du Front populaire. En mai 1936, ce front populaire gagne les élections législatives (députés) et Léon Blum devient chef du gouvernement. De nombreuses réformes sociales sont mises en place (voir schéma + (doc.3 et 4 p.70)) mais cette expérience démocratique prend fin en 1938 après la démission de Léon Blum en juin 1937, du fait de la crise économique et des divisions au sein du gouvernement. Pendant ce temps, les régimes totalitaires se développent tandis qu’Hitler décide d’agrandir son territoire. La peur d’un nouveau conflit empêche les démocraties de s’opposer aux coups de force d’Hitler : par les accords de Munich (1938), le gouvernement français accepte l’annexion des Sudètes - partie ouest de la Tchécoslovaquie, pourtant alliée de la France. On ne fait rien non plus lors de la Guerre d’Espagne. En Espagne, le général Franco se soulève contre la République démocratique. Une guerre civile se déroule de 1936 à 1939 entre franquistes et républicains. Franco reçoit une aide militaire de l’Allemagne nazie et de l’Italie fasciste. Le camp républicain est aidé par des volontaires européens, mais aucun pays ne les soutient officiellement (par exemple, la France craint de se mêler au conflit). En 1939, Franco l’emporte et installe un régime totalitaire (dossier p.72-73). En août 1939, l’Allemagne signe avec l’URSS un pacte secret de non-agression (pacte germanosoviétique - rompu en juin 1941 quand Hitler envahit l’URSS) : ils se promettent de ne pas s’attaquer et de se partager la Pologne en cas de guerre européenne. Le 1er septembre 1939, l’Allemagne envahit la Pologne, soutenue par l’URSS. Dès lors, le Royaume-Uni et la France se portent au secours de la Pologne : c’est le début de la Seconde Guerre mondiale. Conclusion : Les traités de paix de 1919 et la crise économique de 1929 ont provoqué l’arrivée au pouvoir de régimes totalitaires en Europe. Ceux-ci déclenchent des guerres pour affirmer leur pouvoir et les démocraties semblent impuissantes à les arrêter. Dès lors, tout est en place pour que débute la Seconde Guerre mondiale.