See discussions, stats, and author profiles for this publication at: https://www.researchgate.net/publication/279940028 Impact de la pollution organique sur la qualité des eaux superficielles dans le Nord-Est algérien Article in Science et Changements Planetaires - Secheresse · January 2007 CITATIONS READS 28 1,324 5 authors, including: Derradji El Fadel Kherici bousnoubra Houria Badji Mokhtar - Annaba University Badji Mokhtar - Annaba University 53 PUBLICATIONS 128 CITATIONS 35 PUBLICATIONS 178 CITATIONS SEE PROFILE SEE PROFILE Nacer Kherici Badji Mokhtar - Annaba University 73 PUBLICATIONS 327 CITATIONS SEE PROFILE Some of the authors of this publication are also working on these related projects: Gestion et vulnérabilité des eaux à la pollution dans l'extrême Nord-Est algérien View project Thermo-mineral waters of Hammam Meskoutine (north-east Algeria): Composition and origin of mineralization View project All content following this page was uploaded by Derradji El Fadel on 21 April 2016. The user has requested enhancement of the downloaded file. Article scientifique Sécheresse 2007 ; 18 (1) : 23-7 Impact de la pollution organique sur la qualité des eaux superficielles dans le Nord-Est algérien Fadel Derradji1 Houria Bousnoubra1 Nacer Kherici1 Michèle Romeo2 Raoul Caruba3 Résumé 1 Mots clés : Algérie, eau superficielle, engrais, hydrobiologie, pollution, qualité de l’eau, ressource en eau. Département de géologie, Université Badji Mokhtar, BP 12, 23000 Annaba Algérie <[email protected]> <[email protected]> <[email protected]> 2 Réponse des organismes aux stress environnementaux (ROSE), INRA-Université de Nice-Sophia Antipolis, BP 71, Parc Valrose, 06108 Nice cedex 02 <[email protected]> 3 Institut des relations interuniversitaires avec la Mauritanie (IRIM), Université de Nice-Sophia Antipolis, Parc Valrose, 06108 Nice cedex 02 <[email protected]> L’objectif principal de ce travail est l’étude, dans un contexte particulier, de l’impact de la pollution organique par l’ammonium, les nitrates, les nitrites, la demande biologique en oxygène sur 5 jours (DBO5) et l’oxygène dissous sur la qualité des eaux superficielles. Les échantillons étudiés concernent les rivières de Kébir Est et Bounamoussa dans l’extrême Nord-Est de l’Algérie durant les années 2000 et 2001. Abstract Impact of organic pollution on the quality of superficial waters in the north-east of Algeria The principal objective of this study is the analysis, in a particular context, of the impact of organic pollution induced by ammonium, nitrates, nitrites, biological demand for oxygen (BDO5), and dissolved oxygen, on the quality of superficial waters. The samples studied to that end are those taken in 2000 and 2001 from the Kébir East and Bounamoussa rivers in far north-east Algeria. Key words: Algeria, fertilizer, hydrobiology, pollution, surface water, water quality, water resources. L’ doi: 10.1684/sec.2007.0065 accroissement accéléré de la contamination des systèmes aquatiques au cours des dernières années ainsi que la modification progressive de la nature des pollutions qui deviennent de plus en plus chimiques et toxiques à court ou long terme, ont contribué à faire de la détermination de la qualité chimique des eaux l’une des tâches quotidiennes des organismes d’application et l’un des principaux soucis de la recherche hydroécologique [1]. Les nitrates constituent le principal paramètre de la pollution organique. Ils se Sécheresse vol. 18, n° 1, janvier, février, mars 2007 trouvent essentiellement dans les engrais et constituent la source majeure de matières azotées des plantes. Les deux tiers de la pollution par les nitrates sont causés par les cultures et l’élevage intensif. Les agriculteurs utilisent de plus en plus d’engrais car les productions agricoles en nécessitent des quantités importantes (jusqu’à 500 kg/ha) pour un meilleur rendement. Si on met trop d’engrais, la plante ne peut tout absorber et les nitrates s’infiltrent donc dans le sol et finissent par polluer les nappes phréatiques puis les rivières. 23 L’inconvénient des matières organiques est de favoriser l’apparition de mauvais goûts de l’eau qui pourront être exacerbés par la chloration, et de faciliter le développement des germes, algues et champignons [2]. Cadre géologique La région d’étude est limitée : – au nord, par la mer Méditerranée ; – au sud, par les monts de Cheffia ; – à l’est, par la frontière algérotunisienne ; – à l’ouest, par le bassin-versant de la Seybouse. Caractéristiques de la région d’étude La région d’étude fait partie de l’ensemble géologique du Tell algérien nord-oriental. Cet ensemble s’étend de la région de Constantine à la frontière algérotunisienne. Le bassin de la Mafragh (Bounamoussa et Kébir Est) comprend les unités suivantes : – le Trias localisé au sud de la région d’étude (diapirs triasiques, calcaires vermiculés, ensemble gréso-pélitique) ; – les formations métamorphiques situées dans le massif de l’Edough qui domine la ville d’Annaba (schistes, micaschistes, gneiss, cipolins et amphibolites) ; – les terrains sédimentaires d’âge Oligocène à Burdigalien inférieur ; il s’agit de grès, argiles et marnes ; – les dépôts du Quaternaire, les uns d’origine marine (dépôts alluvionnaires, grès de plage) et les autres relevant de la sédi- Aperçu climatique La région d’étude est soumise à un climat méditerranéen caractérisé par deux saisons distinctes : l’une humide, marquée par une forte pluviosité et de faibles températures allant du mois d’octobre à mai, et l’autre sèche et chaude avec de fortes températures atteignant leur maximum au mois d’août et de faibles pluies. Les vents dominants soufflent de la mer en hiver avec le nord-sud comme principales directions. En été, le sirocco souffle du SSW avec un effet de dessèchement qui se fait sentir pendant environ un mois. Situation géographique Selon la délimitation des bassins adoptée par l’Agence nationale des ressources hydriques (ANRH), le bassin-versant de la Mafragh fait partie du bassin « côtier constantinois » (code : 03), situé dans l’extrême Nord-Est algérien. Il est drainé par deux rivières importantes – Bounamoussa à l’ouest et Kébir Est à l’est – qui rejoignent la mer Méditerranée par un exutoire unique : l’oued Mafragh (figure 1). RÉSEAU HYDROGRAPHIQUE DE LA WILAYA D'EL TARF AGENCE DE BASSIN HYDROGRAPHIQUE Constantinois-Seybousse-Melleque N M É D I T E R R A N É E M E R LA LAC MELAH GA RA AP M OUM TEBOUL BERRIHANE MA EL CHOTT an Lach KH AD NA MO US SA M' SEYBOUSE A BR KE IS T ES BOUTELDJA LAC DES OISEAUX 1 MEXA a. G reg u Bo I BARRAGE our A EL TARF BESBES I MEXA CHEFFIA as ZITOUNA BARRAGE CHEFFLA T d ue O O ue d OU ED 2 S U ug na Zitou ASFOUR E N ed Ou BO U DREAN LAC TONGA OUED RA CHEBAITA. MOKHTAR BEN M'HIDI LAC QUBEIRA Bo W. ANNABA MELOUL EL KALA AIN EL KERMA 1 Oued Kébir Est 2 Oued Bounamoussa Ou e d : frontière algéro-tunisienne BOUHADJAR JAR Pr. HAD W. GUELMA : limites de wilaya : oued : chef lieu de wilaya : agglomération : lac 0 10 20 kilomètres W. SOUK AHRAS : marécage Figure 1. Carte de situation géographique. 24 Sécheresse vol. 18, n° 1, janvier, février, mars 2007 N° 1 2 Rivières Kébir Est Bounamoussa Stations Mexa (barrage) Cheffia (barrage) mentation continentale (grès, terre rouge, dunes, éboulis, alluvions). Matériel et méthode Les prélèvements concernent les cours d’eau du Kébir Est et Bounamoussa situés dans l’extrême Nord-Est algérien (figure 1 et tableau 1). Les échantillons prélevés durant les années 2000 et 2001 ont été analysés au laboratoire central de l’Algérienne des Eaux (ADE) à Annaba (Algérie). Les méthodes de dosage des différents éléments sont celles qui figurent dans le Recueil des normes françaises. EauxMéthodes d’essai de l’Association française de normalisation (Afnor) [3]. L’Organisation mondiale de la santé (OMS) recommande une grille de qualité pour les paramètres de la pollution organique [4, 5] (tableau 2). Résultats et discussion L’interprétation des diagrammes représentant les différents paramètres de pollution organique des eaux superficielles donne des résultats sur la contamination ou non de ces eaux [6]. L’évolution (O2 dissous-nitrates) de l’oued Kébir Est à la station Mexa-barrage (figure 2) montre une baisse des teneurs en nitrates aux mois d’avril et de mai due probablement au manque de précipitations, et un enrichissement du milieu en O2 dissous entre février et mai qui est confirmé par les nitrates. La figure 3 (O2-ammonium) montre un milieu assez oxydé marqué par de faibles quantités de NH4+. Tableau II. Grille de qualité des eaux potables Paramètres de pollution organique Ammonium (NH4+) Nitrates (NO3–) Nitrites (NO2–) DBO5 O2 dissous Limite de qualité pour les eaux potables 0,5 mg/L 50 mg/L 0,1 mg/L 3 mg/L 75 % (% de saturation) DBO5 : demande biologique en oxygène sur 5 jours. Sécheresse vol. 18, n° 1, janvier, février, mars 2007 Concentrations (mg/L) 10 9 8 7 6 5 4 3 2 1 0 O2 dissous Nitrates Jan Fev Mars Avr Mai Juin Sep Nov Dec Mois Figure 2. Évolution de l’O2 dissous et des teneurs en nitrates de l’oued Kébir Est à la station de Mexa-barrage. L’ammonium des eaux superficielles peut avoir pour origine : – la matière végétale des cours d’eau ; – la matière organique animale ou humaine (l’homme élimine 15 à 30 g d’urée par jour) ; – les rejets industriels ; – les engrais, etc. Sa présence est à rapprocher des autres éléments azotés identifiés dans l’eau : nitrites et nitrates. La représentation graphique des teneurs en ammonium, nitrates et nitrites (figure 4) montre entre juin et novembre (période sèche, manque de précipitations et d’oxygène) une nette diminution de l’oxygène dissous. Il s’ensuit que les nitrates diminuent pour se transformer en nitrites (NO2-) et pour enfin se réduire en NH4+. On assiste à un phénomène naturel : la dénitrification due probable- ment à la consommation de l’O2 dissous par les micro-organismes présents dans l’oued [7]. Les nitrites proviennent soit d’une oxydation incomplète de l’ammoniaque – la nitrification n’est pas conduite à son terme –, soit d’une réduction des nitrates sous l’influence d’une action dénitrifiante. Une eau qui renferme des nitrites est à considérer comme suspecte car une détérioration de la qualité biologique lui est souvent associée. Tout cela est confirmé par la concordance entre l’évolution du diagramme pluviothermique et l’oxygène dissous (figure 5) durant la période sèche et humide. L’évolution des concentrations en ammonium, nitrates et nitrites de l’oued Bounamoussa à la station Cheffia-barrage (figure 6) fait apparaître entre janvier et avril une augmentation de NO3-, NO2- O2 dissous (mg/L) 0,14 10 9 0,12 8 7 0,1 6 0,08 5 4 0,06 3 0,04 2 NH4 (mg/L) Tableau I. Stations de prélèvement. O2 dissous Ammonium 0,02 1 0 0 Jan Fev Mars Avr Mai Juin Sept Nov Dec Mois Figure 3. Évolution de l’O2 dissous et des teneurs en ammonium de l’oued Kébir Est à la station de Mexa-barrage. 25 D ec N ov Ju in M ai Av r ar s M Fe v Ja n Se pt Mois Concentrations (mg/L) 10 1 Dénitrification Ammonium Nitrites Nitrates 0,1 0,01 Figure 4. Évolution des teneurs en nitrites, nitrates et ammonium de l’oued Kébir Est à la station Mexa-barrage. T (°C)-O2 dissous (mg/L) Précipitations (mm) 70 Conclusion 140 Période sèche 60 120 50 100 40 80 O2 dissous T 60 Précipitations 30 Période humide 20 40 D ec ov N Se pt Ja nv i Ju in 0 M ai 0 Av r 20 er Fé vr ie r M ar s 10 Mois Figure 5. Représentation graphique du diagramme pluviothermique et de l’O2 dissous de l’oued Kébir Est à la station de Mexa-barrage. D éc N ov pt Se Ao ût Ju in Av r M ar s Fé vr ie r er Ja nv i M ai Mois Concentrations (mg/L) 10 1 Dénitrification Ammonium Nitrites Nitrates 0,1 0,01 Figure 6. Évolution des teneurs en nitrites, nitrates et ammonium de l’oued Bounamoussa à la station Cheffia-barrage. 26 et NH4+ provoquée par l’apport d’engrais. La présence des matières organiques est due au lessivage. En effet, la migration des nitrates est nettement plus rapide sur les surfaces cultivables laissées nues pendant l’hiver. Les rejets des collectivités et occasionnellement de certaines industries (engrais, explosifs) peuvent aussi concourir à l’enrichissement en nitrates des eaux superficielles. Le diagramme pluviothermique et l’oxygène dissous (figure 7) sont en concordance. On note une augmentation d’O2 dissous entre les mois de mai et de novembre (période sèche) et une diminution pendant la période humide (mois de novembre à mai). La pollution représente un sérieux problème pour l’environnement à cause des rejets déversés dans les rivières de Kébir Est et Bounamoussa et de l’utilisation excessive des engrais en agriculture. Le degré de pollution varie d’une zone à l’autre avec des teneurs qui dépassent parfois celles que préconise l’OMS. On peut noter une concordance significative entre les variations pluviothermiques et l’oxygène dissous dans les oueds Kébir Est et Bounamoussa. Les méthodes basées sur le carbone, dénominateur commun des matières organiques, se sont considérablement développées grâce à l’évolution des performances de l’instrumentation [8]. Ces techniques présentent l’avantage d’être applicables à toutes les catégories de produits organiques, donc de permettre d’apprécier d’une façon plus complète la pollution surtout en présence de composés difficilement oxydables. Dans la région d’étude, même si les teneurs en matières organiques (surtout NO3-) des eaux superficielles et souterraines ne sont pas encore alarmantes, la situation risque de s’aggraver. L’état actuel de pollution des nappes souterraines est le reflet des substances nitratées infiltrées quelques années auparavant, l’importance du temps de transfert dépendant de la profondeur de la nappe aquifère et de la structure de la roche [9]. Les quantités d’engrais azotés employées n’ont guère diminué, voire ont augmenté – malgré la sensibilisation des agriculteurs – parce que les surfaces de terres dévolues aux labours ont progressé. ■ Sécheresse vol. 18, n° 1, janvier, février, mars 2007 70 140 60 120 Période sèche 50 100 40 30 4. Organisation mondiale de la santé (OMS). Directives de qualité pour l’eau de boisson. Recommandations. 2e édition. Genève : OMS, 1993. Précipitations (mm) T (°C)-O2 dissous (mg/L) 80 O2 dissous Période 60 humide 5. Rodier J. L’analyse chimique et physicochimique de l’eau. 6e édition. Paris : Dunod, 1982. P D ec Se p Ao û Ju i M t 0 N ov 0 t 20 n 10 ai 40 Av r 20 Ja nv ie r Fé vr ie r M ar s T Mois 6. Mayet J. La pratique de l’eau. Traitements aux points d’utilisation. Paris : Le Moniteur, 1994. 7. Derradji F. Identification quantitative et qualitative des ressources en eau dans la région d’Annaba – El Tarf (Nord-Est de l’Algérie). Thèse de doctorat ès sciences, université d’Annaba, Algérie, 2004. Figure 7. Représentation graphique du diagramme pluviothermique et des teneurs en O2 dissous de l’oued Bounamoussa à la station de Cheffia-barrage. Références 1. Enfield CG, Yates SR. Organic chemical transport to groundwater. Pesticides in the soil environment : processes, impacts and modeling. Book n° 2. Madison (Wisconsin) : Soil Science Society of America, 1990. Sécheresse vol. 18, n° 1, janvier, février, mars 2007 View publication stats 2. Cooper CM. Biological effects of agriculturally derived surface water pollutants on aquatic systems. A review. J Environ Qual 1993 ; 22 : 402-8. 3. Association française de normalisation (Afnor). Recueil des normes françaises. EauxMéthodes d’essais. 6e édition. Paris : La Défense : Afnor, 1995. 8. Thomas RF, Booth RL. Selective electrode measurement of ammonia in water and wastes. Environnemental Science and Technology 1973 ; 7 : 523. 9. Derradji F, Khérici N, Roméo M, Caruba R. Aptitude des eaux de la vallée de la Seybouse à l’irrigation (Nord-Est algérien). Sécheresse 2004 ; 15 : 353-60. 27