Pathologie mammaire Pr F. TERKMANI l-Rappel 1-l anatomique Les glandes mammaires sont en nombre de deux fixées aux muscles pectoraux. lls occupent la partie antéro-supérieure du thorax. Cliniquement, le sein est divisé en quatre quadrants : su péro-externe, su péro-interne, inféro-externe et i nféro-interne. 1-2 Histologique glande mammaire est organisée en une vingtaine de lobes. Chaque lobe est composé de 2A à 40 lobules et chaque lobule contient L0 à 100 alvéoles. La o L'unité de base est l'acinus ou alvéole. L'alvéole est une cavité arrondie en forme de cul de sac qui constitue la partie sécrétrice de la glande. Ces acini sont tapissés par des cellules épithéliales reposant sur une couche de cellules myoépithéliales le tous limité par une membrane basale. o Chaque acinus se draine par un canal intra lobulaire ou alvéolaire Les acini et les canaux intra lobulaires forment un lobule qui se draine par un canal inter lobulaire o Plusieurs lobules se réunissent pour former un lobe glandulaire qui se draine par un canal galactophore de premier ordre. Les canaux galactophores convergent vers le mamelon. et conjonctif est étroitement lié au tissu glandulaire, la quantité de tissu adipeux est en grande partie responsable du volume des seins Le tissu adipeux rôle de la glande mammaire est la sécrétion lactée. Cette sécrétion est sous la dépendance de stéroides placentaires. Le Dans le cycle menstruel les æstrogènes entrainent la multiplication des cellules acineuses. La progestérone bloque la prolifération et assure la maturation acineuse Souvent secondaire à une infection au streptocoque ou staphylocoque survenant au décours de la lactation. Le sein apparait augmenté de volume douloureux, induré, chaud, congestif associé à une fièvre et à une tuméfaction des ganglions axillaires Histologiquement on retrouve une métaplasie squameuse des canaux galactophores associée à un abcès à paroi épaisse Le diagnostic différentiel se fait avec une mastite carcinomateuse ll s'agit d'une masse indolore La tranche d'âge varie de 24 à 72 ans; cas occasionnels chez des patients masculins Souvent associé au diabète de type I ou à d'autres maladie auto-immune associée à I'antigène leucocytaire (HLA) Tissu fibreux, caoutchouteux et dense On retrouve I Un stroma collagénique extensif avec atrophie des acini (Fig.L ) 0 Un infiltrat lymphocytaire dense qui entoure les lobules résiduels pouvant s'organiser sous formes de centre germinatif t) l-Jne vascularite lymphocytaire qui est une constante Fig.1 : Mastite lymphocytaire t) Carcinome infiltrant: l'hypocellularité et I'atypie des cellules stromales peuvent suggérer un carcinome lobulaire 0 Changement fibrokystique: I'inflammation dans le changement fibrokystique est plus périductale que périlobulaire : (Fig.2) I Tuberculose: granulomes nécrosants; la mise en évidence de l'agent pathogène M. tuberculosis est requise pour le diagnostic I lnfection mycosique ou parasitaire t)Réaction granulomateuse au contact d'un conduit galactophorique rompu 0Sarcoïde: généralement dans le contexte d'une maladie établie 0 Mastite granulomateuse idiopathique Microscopie : On retrouve I Une inflammation granulomateuse centrée sur les lobules I Un lnfiltrat mixte de cellules inflammatoires associées à des granulomes fait de cellules épithélioTdes et géantes accompagné d'une nécrose caséeuse en cas de tuberculose. Fig.2 : Mastite granulomateuse !ll- Tumeurs bénignes 3-1 Tumeurs épithéliales 3-1-1 Papillome intra canalaire Peut se présenter cliniquement par un écoulement sanglant du mamelon. Cette lésion peut être solitaire sous aréolaire ou multiples périphériques dans le sein La lésion papillaire est souvent visible dans les canaux dilatés Si le conduit est dilaté sous forme d'un kyste, le terme de papillome intra kystique est approprié Microscopie: Prolifération intra canalaire d'architecture papillaire à axe conjonctivo vasculaire tapissé de cellules épithéliales et myoépithéliales (Fig.3) Papillomes périphériques multiples Papillome intracanalaire bénin Fig.3 : Papillome intra canalaire 3-1-2 Adénonne tubulaire ll s'agit d'une prolifération bénigne bien circonscrite des structures tubulaires, bordée d'un épithélium et d'une couche de cellules myoépithéliales 90% des patients ont moins de 40 ans; se présente sous forme d'une masse mobile découverte fréquemment au cours de la grossesse Nlacroscopie Nodule solide, ferme de couleur jaune et de taille > 1 cm lVTieroseopie Tumeur encapsulé ou bien limitée faite de Tubes étroitement groupés (Fig. ) avec un stroma hypocellulaire associé à de rares lymphocytes L'épithélium peut présenter des figures mitotiques, une métaplasie apocrine et des remaniements sécrétoires Diagnostic différentiel I Le fibroadénome dont la composante stromale est néoplasique I Adénose nodulaire: moins bien définie / non encapsulée Fig.4 : Adénome tubulaire 3-1-3 Adénome lactescent Femmes en âge de procréer; découvert pendant la grossesse ou au cours de l'allaitement Macroscopie Masse bien circonscrite,lisse de couleur jaune Microscopie (Fig.5) Les aspects morphologiques peuvent varier selon la période (grossesse ou post partum): - Grossesse: matériel sécrétoire dans la lumière des canaux et cytoplasme vacuolaire - Post-partum: distension marquée, cellules cloisonnées et cytoplasme vacuolaire Fig.S : Adénome lactescent 3-2 Tumeurs épithéliales et conjonctives 3-2'1 Adénofibrome Lésion qui se présente de la puberté à 30ans sous forme de nodule isolé, parfois multiples voir bilatéraux, le plus souvent découvert fortuitement par la patiente. ll s'agit d'une masse nodulaire indolore, ferme, élastique, bien circonscrite, mobile sur les plans cutanés et profonds. Cette lésion siège préférentiellement dans le quadrant supéro-externe gauche. ll n'existe pas de signe cutané ni d'adénopathie associée. Macroscopie : tumeur encapsulée vascularisée, ronde ou bosselée âvec une surface brillante blanche. Microscopie: ll s'agit d'une prolifération tumorale: I'architecture lobulaire a disparu. Cette prolifération est double, développée à partir des constituants normaux du lobule, épithéliaux et conjonctifs. Les structures glandulaires sont bordées de deux assises cellulaires. Elles réalisent : - soit des petits canaux arrondis de forme régulière : fibroadénome péri canalaire (fig.6) Fig.6 Fibroadénome péri canalaire ou tubuleux - Soit des canaux plus volumineux, parfois kystiques, plus fréquemment collabés, avec une lumière virtuelle très ramifiée, aboutissant à des structures étoilées caractéristiques fibroadénome intra canalaire : Fig.6 Fibroadénome intra canalaire conjonctive qui sépare les structures épithéliales est faite, comme le tissu palléal, de petites cellules fusiformes, régulières, éparses dans une trame de fines fibres collagènes La composante 3-2-2 Tumeurs phyllodes L'âge de survenue varie de 15 à 60 ans, avec un âge moyen de 45 ans, soit environ 20 ans plus tard que les adénofibromes. Le jeune âge est corrélé à un degré moindre de malignité. tumeurs phyllodes sont rares, llfaut y penser devant un nodule tissulaire en accroissement rapide. L'imagerie n'est pas spécifique. Les micro-biopsies permettent de poser un diagnostic histologique pré-opératoire. Les tumeurs phyllodes, comme les adénofibromes, sont des tumeurs fibro-épithéliales, c'est-à-dire, des tumeurs à double prolifération, à la fois épithéliale glandulaire et conjonctive. C'est l'aspect histologique de la composante conjonctive qui va permettre de distinguer les tumeurs phyllodes bénignes (diagnostic différentiel avec l'adénofibrome), les tumeurs phyllodes malignes (sarcomes phyllodes) et les tumeurs phyllodes frontières (border-line) : ces tumeurs doivent donc faire l'objet d'un diagnostic pré-opératoire précis, par micro-biopsie dirigée pour histologie, afin de prévoir la bonne prise en charge chirurgicale. Les tumeur phyllode se présente sous la forme d'un nodule ferme, d'accroissement rapide, dont le temps de doublement est souvent inférieur à 3 mois, polylobé, régulier, mobile quand il est de petite taille, adhérent aux plans musculaires lorsqu'il est volumineux. La L'histologie montre une double prolifération glandulaire et conjonctive. La composante glandulaire est faite de glandes revêtues de cellules épithéliales et myo-épithéliales avec ou sans hyperplasie épithéliale. La prolifération conjonctive, plus dense que dans l'adénofibrome, est faite de fibroblastes : cette prolifération conjonctive est plus marquée en périphérie des canaux et quelques mitoses peuvent se voir, contrairement à l'adénofibrome où elles sont virtuellement absentes. Tumeur phyllode rnaligne l2A% des tumeurs phyllodes) conjonctive présente des atypies marquées et de très nombreuses mitoses, parfois atypiques (plus de 10 mitoses pour 10 champs, à l'objectif 40). La composante sarcomateuse peut prendre tous les types de différenciation, le plus souvent liposarcome, myosarcome, rhabdomyosarcome. En périphérie, cette tumeur est très mal limitée. La composante Tumeur phyllode frontière l2Oo des tumeurs phyllodes) On trouve ici, tous les aspects histologiques intermédiaires entre la tumeur phyllode bénigne et la tumeur phyllode maligne. lV Tumeurs épithéliales malignes 4-l Carcinome in situ a- Carcinome intra canalaire (Fig.): Carcinome des canaux galactophores n'infiltrant pas le tissu conjonctif voisin et caractérisé par quatre types architecturaux: massif, comédons, papillaire et cribriforme. b- Carcinomes lobulaires in situ : carcinome intéressant les canalicules intra lobulaires qul sont comblés et distendus par une prolifération de cellules peu jointives, sans envahissement du tissu conjonctif voisin \- . i' "*-J.f t -* , E.,fo arctnome (Fig. 7): a. C'est la forme la plus fréquente de tumeur maligne du sein Les aspects macro- et microscopiques sont extrêmement variables. Les cellules tumorales se disposent généralement en îlots, en travées ou en formations glanduliformes. lL peut apparaître des foyers de carcinome intra canalaire. La tumeur est parfois multicentrique. Cette tumeur a été appelée carcinome canalaire infiltrant sans autre indication (SAl) ;*: l'+'*,7 *'LtJ.=' 'l '-- J!t, r-iii'' §-t*+.-'r , \-" -. i,B;:"ï k 'ti-,,SffiI " Fig.7 : Carcinome canalaire infiltrant b. Carcinome lobulaire infiltrant (FiS.8): Carcinome infiltrant formé de cellules régulières ressemblant à celles du carcinome lobulaire in situ et ayant en général un faible taux de mitoses. Typiquement, les cellules s'ordonnent en file indienne, s'alignent ou apparaissent individuellement englobées dans du tissu fibreux. Le stroma peut être assez abondant pour donner un aspect squirrheux, tant macroscopiquement que microspiquement. Les cellules infiltrantes se disposent souvent concentriquement autour des canaux donnant un aspect "en cible". L'identification de reliquats de carcinome lobulaire in situ aide au diagnostic. Les cellules tumorales peuvent se présenter sous la forme de cellules en bague à chaton en raison d'une distension par du mucus. c. (Fis. e): Carcinome riche en mucus épithélial extracellulaire, en quantité suffisante pour être visible macroscopiquement et se reconnaitre au microscope comme extra- et intracellulaire. On admet que le pronostic des carcinomes mucineux purs est meilleur que celui des carcinomes canalaires infiltrants. On peut trouver du mucus dans la plupart des carcinomes mammaires mais le terme de carcinome mucineux ne doit être appliqué qu'à ceux qui comportent une grande quantité de mucus extracellulaire. Fig.9 : Carcinome mucineux d. Carcinome médullaire (Fie. L0): Carcinome bien limité constitué de cellules peu différenciées dans un stroma peu abondant avec une intense infiltration lymphoide. Les cellules tumorales sont grandes, avec des noyaux vésiculeux, de gros nucléoles et des limites cytoplasmiques imprécises. L'architecture habituelle est faite de plages et de larges travées anastomotiques sans structures glanduliformes. Les limites de la tumeur doivent être histologiquement arrondies, refoulant les tissus voisins sans les pénétrer ni s'y infiltrer. Malgré le faible degré de différenciation et le nombre élevé de mitoses, ces tumeurs paraissent avoir un pronostic plus favorable que celui des carcinomes canalaires infiltrants. Fig.1"0 : Carcinome médullaire e. Carcinome papillaire (FiS. 11): Carcinome rare dont I'architecture infiltrante est surtout faite de structures papillaires. Fig.11 : Carcinome papillaire f. earcinome tubuleux (Fig. 12): Carcinome infiltrant extrêmement différencié dont les cellules sont régulières et disposées en tubules bien structurés. Fig.t2 : Carcinome tubuleux Ne constituent pas une forme histologique, mais plutôt une entité clinique. Le terme est utilisé pour Ies cancers qui présentent ædème, congestion, sensibilité et augmentation rapide du volume du sein. Ces caractères sont associés à une infiltration massive des lymphatiques du derme par la tumeur. (Fie. 13): h. Associée à un carcinome canalaire sous-jacent jamais à un lobulaire. Lésion dans laquelle de grandes cellules malignes peu colorées contenant de la mucine apparaissent dans l'épiderme du mamelon, essentiellement dans sa moitié profonde. Fig.13 : Maladie de Paget du mamelon V- Critères histologiques Quels critères histologiques doivent être mentionnés dans un compte rendu ? : type histologique Le grade histopronostique de Scarff Bloom et Richardson La présence de carcinome intra canalaire Le caractère Erb 2 (Epidermal Receptor 2 Le Les récepteurs hormonaux taille La qualité des limites d'exérèse chirurgicale La (SBR) Les embols carcinomateux Le nombre de ganglions examinés et le nombre de ganglions envahis avec ou sans rupture capsulaire. Le grade histopronostique de Scarff Bloom et Richardson (SBR) comprend trois grades I ll lll, obtenu par l'addition de trois critères architecture, atypies cytonucléaires et nombre de mitoses. Les trois critères sont cotés en L,2 et 3 : la tumeur comprend que des tubes partiellement tubulaires la tumeur ne comprend aucun tube noyaux réguliers monomorphes atypies modérées noyaux pléomorphes avec atypies marquées le nombre de mitoses est recherché sur 20 champs au fort grossissement en périphérie de la tumeur. Le nombre de mitose le plus important par grand champ est retenu. Si le nombre est de L ou 0 : le critère est coté en L Si le nombre est de 2 : le critère est coté en 2 Si le nombre est de 3 ou plus : le critère est coté en 3 L'addition des trois critères permet de réaliser le grade : Grade I :3,4,5 Grade ll :6,7 Grade lll : 8,9 Le grade SBR est réalisé sur tous les types histologiques de cancer infiltrant sauf le carcinome médullaire réalisés par une étude immunohistochimique, à l'aide d'anticorps monoclonaux. Le marquage est nucléaire. Si plus de 10 %des cellules sont marquées, le récepteurest considéré positif. L'intensité est également évaluée mais n'est pas considérée comme un facteur pronostique.