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L'instabilité antérieure récidivante de l'épaule (I.A.R.E) est une symptomatologie chronique
qui survient au décours d'une luxation antéro-interne ou d'emblée par des subluxations
répétées voire des épisodes douloureux purs [54]. L'I.A.R.E se manifeste sous forme
d'appréhension gênante de subluxation voire de luxation lorsque le patient porte le bras en
abduction et en rotation externe.
La première description détaillée de la luxation antérieure de l’épaule ainsi que les premières
méthodes de réduction sont dues à Hippocrate [42]. Ensuite, il y eut la description de la
luxation récidivante de l’épaule par Joseph Desault en 1735 [49] dont Bankart, en 1923,
attribue la pathogénie au détachement de la capsule articulaire de la partie antérieure de la
glène. L’I.A.R.E est une pathologie fréquente, avec un taux de récidive de 22% [55], et grave
car compromettant le pronostic fonctionnel socio-professionnel du patient.
Si de multiples études anatomiques et biomécaniques nous aident à mieux comprendre les
lésions entraînant une instabilité antérieure chronique de l'épaule, le diagnostic, la
classification, le traitement et la rééducation continuent à poser des problèmes aux chirurgiens
orthopédistes. Cela est surtout dû au fait que les exigences fonctionnelles des patients ont
changé. Au début, le seul but du traitement chirurgical était de prévenir les récidives post
opératoires, surtout s’il s’agissait du membre non dominant. Le patient actuel exige non
seulement une stabilité parfaite mais aussi une force et une mobilité normale.
Dès 1880, plusieurs méthodes de reconstruction anatomique (de la capsule articulaire, des
tendons, des ligaments, du labrum glénoïdien ou de la coiffe des rotateurs) font leur apparition
suivies des techniques de tension de la capsule, d’approfondissement de la cavité
glénoïdienne, et récemment de la technique de shrinkage thermique (par laser ou
radiofréquence).
Le traitement de la luxation récidivante de l'épaule par la butée ostéoplastique type Latarjet
constitue une des méthodes thérapeutiques proposées. Le résultat pour être satisfaisant doit,
certes supprimer les récidives mais aussi restaurer une fonction normale de l'épaule et éviter
l'apparition de douleur articulaire.
Le but de notre travail est :
- de répertorier les échecs et d’en rechercher les causes
- de comparer la technique de Latarjet aux autres techniques de stabilisation de l’épaule.
1
Rappels Anatomiques
1. Anatomie descriptive[ 4.12.21.34.41]
Haut

 Dedans
L'articulation scapulo-humérale est une énarthrose
non emboîtée, dite « suspendue », extrêmement
mobile mettant en jeu la cavité glénoïdale de la
scapula et la tête humérale (fig. 1). Elle semble
disproportionnée avec une grosse tête humérale
qui déborde largement en avant et en arrière d’une
petite
glène.
Seules
les
structures
Fig. 1 : Vue antérieure de l’articulation
fibrocartilagineuses et musculaires annexées à
scapulo-humérale (calque radiographique)
cette articulation vont permettre de la stabiliser.
d’après Kamina [26]
1. acromion
5. processus coracoïde
2. tubercule majeur
6. clavicule
3. tête humérale
7. scapula
4. cavité glénoïdale
1.1. Structures osseuses
La cavité glénoïde (fig. 2)
Elle est faiblement concave et regarde en avant. Sa surface
représente le tiers de la surface articulaire de la tête
humérale. Sa profondeur est augmentée par le labrum,
fibrocartilage qui s’insère sur son pourtour et est adhérent à
la partie antéro-inférieure de la glène.
Fig. 2 : Vue latérale de la scapula droite d’après Kamina [26]
1. acromion
2.tubercule supraglénoïdal
5. tubercule infraglénoïdal
6. bord latéral
2
3.processus coracoïde
4.cavité glénoïdale
7.épine de la scapula
8.fosse infra épineuse
Le labrum ou le bourrelet glénoïdien
C’est un fibrocartilage, il s’insère sur le pourtour de la cavité glénoïde. Il est adhérent dans la
partie antéro inférieure de la glène et surtout d’en accroître la profondeur.
La tête humérale
Haut

 Dedans
Elle représente le tiers d'une sphère dont le diamètre antéropostérieur dépasse le grand diamètre transversal de la glène.
Elle regarde en haut, en dedans et
en arrière. La tête
humérale fait un angle de 135° avec la diaphyse humérale
.
décrivant ainsi l’angle d'inclinaison.
Fig. 3 : Vue antérieure de l’épiphyse
proximale de l’humérus d’après Kamina [26]
1.
fossette supratuberculaire
4. petit tubercule
2.
tête
5. sillon intertuberculaire
3.
col anatomique
6. grand tubercule
1.2. Structures capsulo-ligamentaires
La capsule articulaire et la synoviale (Fig. 4)
Haut

 Dedans
La capsule s'insère autour du bourrelet glénoïdal sur la
scapula et au-delà du col anatomique de l'humérus. Elle
forme
un
manchon
fibreux
au-delà
du
sillon
intertuberculaire qu'elle transforme en canal ostéofibreux
laissant passer le tendon du long biceps. La synoviale
tapisse la face axiale de la capsule ; elle s'attache sur le
bourrelet glénoïdal et envoie une expansion qui engaine la
Fig. 4 : Vue latérale et ouverte
partie intra capsulaire du tendon du biceps
de l’articulation scapulo-humérale d’après Hansen [21 ]
1.
bourse sub-deltoïdienne
5. tendon du biceps brachial (chef long)
2.
cavité glénoïdale
6. ligament coraco-huméral
3.
ligament gléno-huméral inférieur
7. ligament coraco-acromial
4.
ligament gléno-huméral moyen
3
Les ligaments (Fig. 4 et 5)
*le ligament coraco-huméral : extracapsulaire, il est tendu du bord externe de la base
du processus coracoïde et s'élargit devant la capsule pour se terminer en deux
faisceaux sur les tubercules mineur et majeur.
*les ligaments glénohuméraux (supérieur, moyen, inférieur) forment un « Z » à la face
antérieure de la capsule et renforcent la partie antérieure et inférieure de la capsule à
laquelle ils sont intimement liés. Ces ligaments sont facilement définis par les deux
foramens que présente la capsule articulaire:
- le foramen ovale de Weitbrecht est situé dans la partie antéro-supérieure de la
capsule
- et le foramen de Rouvière dans la partie antéro-inférieure.
*Le ligament huméral transverse : c'est une bandelette fibreuse tendue en pont entre
les lèvres du sillon intertuberculaire de l'humérus.
Haut

 Dedans
Fig. 5 : Vue antérieure de l’articulation scapulo-humérale d’après Hansen [21]
1. ligament acromio-claviculaire
5. tendon du biceps brachial (chef long)
2. ligament coraco-acromial
6. ligaments capsulaires
3. tendon supra-épineux (coupé)
7. ligament scapulaire transverse supérieur
4. tendon subscapulaire (coupé)
8. ligament coraco-claviculaire
4
1.3. Les muscles (fig. 6)
Haut

 Dehors
La stabilisation antérieure active de l'articulation scapulohumérale est assurée par le muscle subscapulaire, qui
s'étend de la fosse subscapulaire de la scapula au tubercule
mineur. Il s'étale largement sur la face antérieure de
l'articulation scapulo-humérale venant recouvrir par ses
fibres les plus inférieures le pôle antéro-inférieur de la
glène.
Sur le plan purement descriptif, l'articulation scapuloFig. 6 : Vue antérieure des muscles
humérale semble verrouillée par ce point fibro-musculaire
adducteurs d’après Kamina [26]
situé en bas et en avant de la glène et composée de la poulie
1.
muscle subscapulaire
antéro-inférieure du labrum, du ligament scapulo-huméral
2.
muscle grand pectoral
inférieur, et de la moitié inférieure des fibres du muscle
3.
muscle grand dorsal
subscapulaire.
Les autres muscles sont le sus-épineux, le muscle sous-épineux, le muscle petit rond, le
muscle grand rond, le muscle deltoïde, le muscle biceps et le muscle coraco-brachial.
1.4. Les vaisseaux et les nerfs
Les artères proviennent des rameaux des artères suprascapulaires, circonflexes
humérales antérieure et postérieure. Les veines sont satellites des artères.
Les nerfs sont les rameaux des nerfs suprascapulaire, axillaire et pectoral latéral.
1.5. Les rapports aticulaires
La sphéricité de la tête humérale n’est pas parfaite, son orientation rétroversée assure
un minimum de stabilité antéro-postérieure limitant le risque de luxation. Cette
disposition anatomique prédispose à une grande mobilité aux dépends de la stabilité.
La capsule articulaire avec les ligaments gléno-huméraux volontairement lâche ne peut
pas assurer la stabilisation. La contention passible est assurée par le ligament coracohuméral jouant le rôle de ligament suspenseur de la tête humérale. Parmi les ligaments
5
antérieurs seul le ligament gléno-humérale inférieur a un rôle de frein dans les
mouvements d’abduction et de rotation externe.
Les moyens de contention actifs musculaires assurent à la fois la mobilité et la stabilité
de l’articulation.
Avant

 Dedans
Fig. 12 : Coupe transversale de l’articulation scapulo-humérale gauche avec les
muscles péri-articulaires d’après Kamina [26]
1.
muscle grand pectoral
6. muscle infra-épineux
2.
muscle grand dorsal
7. scapula
3.
muscle grand rond
8. long chef du biceps brachial
4.
muscle suscapulaire
9. muscle deltoïde
5 .muscle petit rond
6
2. Anatomie fonctionnelle
L'articulation scapulo-humérale présente une morphologie anatomique qui lui permet les
mouvements de très grande amplitude. Elle est à trois degrés de liberté autorisant ainsi trois
mouvements élémentaires.
Avant

 Dehors
Fig. 7 : Axes de flexion-extension (en bleu) et d’abduction-adduction (en rouge) d’après
Kamina [26]
N.B. : lors du bilan articulaire, le clinicien, placé derrière
le patient, maintient l’angle inférieur de la scapula d’une
main et fait exécuter les mouvements de l’autre main : c’est
la manœuvre de Desault (fig. 8).
Fig. 8 : Manœuvre de Desault d’après Kamina [26]
7
Flexion-extension (Fig. 7 et 9)
Dans le plan sagittal, autour d'un axe frontal, la flexion
porte le bras en avant (amplitude : 50°) tandis que
l’extension le porte en arrière (amplitude : 28°).
Fig. 9 : Flexion (en bleu) et extension (en rouge) du bras scapula fixe
Abduction- adduction (fig. 10)
Dans le plan frontal, autour d'un axe sagittal, l'abduction
écarte le bras de l'axe médian du corps (amplitude : 50°)
alors que l'adduction rapproche le bras du corps (amplitude :
10°).
Fig. 10 : Mouvements d’adduction avec ou sans
Participation de la scapula et du rachis d’après
Kamina [26]
Rotation latérale et médiale
Son axe est vertical ; il doit être apprécié le coude fléchit à 90°et l'avant bras en
position sagittale.
- la rotation latérale (ou externe) porte l'avant-bras au dehors, avec 3 variétés :
* la rotation coude au corps dite rotation en position 1 (RE1)
* la rotation bras à 90° d’abduction ou en position 2 (RE2)
* la rotation bras à 90° d’élévation antérieure ou en position 3 (RE3)
Son amplitude est de 35°.
8
- la rotation médiale (ou interne) porte l'avant-bras en dedans ; elle se mesure en
faisant passer la main dans le dos du patient par la distance entre l’épineuse de C7 et le
pouce ou en notant le niveau de la vertèbre atteinte.
Son amplitude est de 95°
En combinant les mouvements élémentaires autour des 3 axes, le bras décrit dans
l'espace un cône irrégulier appelé le cône de circumduction (fig. 11).
Fig. 11 : Circumduction de l’articulation scapulo-humérale avec son cône d’après
Kamina [26]
9
3. Anatomie pathologique
3 1- Les Lésions capsulo ligamentaires et labrales
Lésions de Bankart
C'est la désinsertion du bourrelet antéro-inférieur avec son ligament gléno-huméral
inférieur. Lorsqu'elle est plus importante, elle correspond au décollement capsulopériosté de Broca et Harman. Dans certains cas, le bourrelet reste inséré sur la glène et
c'est le ligament gléno-huméral inférieur qui est déchiré. Ces lésions peuvent évoluer
vers la cicatrisation spontanée ou engendrer les épisodes de luxations récidivantes.
Lésions du bourrelet
Molé et Coudane [7] ont décrit 6 types lésionnels à l'arthroscopie tandis que Synder
[56] a décrit en 1990 les SLAP lésions (superior-anterior-posterior lesions) qui
correspondent aux types de lésions du bourrelet de Molé et Coudane.
Type 1 :L'hypermobilité sans désinsertion)
ou SLAP I : éfrangement sans désinsertion
du bourrelet supérieur, il s'agit probablement
plutôt d'un vieillissement du labrum que d'une
vraie lésion d'instabilité
Type 2 : La désinsertion en zone antéroinférieure ou SLAP Il (la plus fréquente), est
une avulsion du labrum par la LPB en
antéro-supérieur
10
Vue de la partie antero-supérieure
du cylindre capsulaire
Coraco-biceps
infraspinatus
supraspinatus
Long chef biceps
Type 3 : La languette (ou lambeau) = SLAP
III : la LPB reste insérée, mais le labrum
supérieur présente une lésion en anse de seau
Muscle triceps
Type 4 : L'anse de seau ou SLAP IV : la
lésion du bourrelet est identique au SLAP III,
mais il existe une association avec une
désinsertion ou une dissection de la LPB
Type 5 : La dégénérescence (fibrillaire) =
SLAP V : associe une lésion de Bankart à un
SLAP II
11
labrum
subscapularis
Type 6 : L'abrasion ou SLAP VI : Il s'agit
d'un lambeau labral similaire à une languette
méniscale
Molé et Coudane ont ajouté un Type 7 ou
SLAP VII qui correspond à : La désinsertion
du labrum de type SLAP 2 se poursuit au
bord supérieur du ligament gléno-huméral
inférieur
3.2. Lésions osseuses
Elles siègent au rebord antéro-inférieur de la glène et/ou au niveau de la tête humérale.
Lésions de la glène antéro inférieure
Les fractures vraies dues: soit à un traumatisme en compression par chute sur le
moignon de l'épaule soit par un arrachement ostéoligamentaire lors d'un mouvement
de rétropulsion, abduction, rotation externe ou d'un armé forcé.
Les éculements de la glène: son importance est variable, allant du simple émoussage
de l'angle antéro-inférieur jusqu'à l'aspect en "pan coupe" emportant tout le bord
antéro-inférieur.
Dysplasie de la glène: c'est une lésion congénitale de la forme de la glène par rapport
au volume de la tête humérale (glène plate) ou du degré de version de la glène
(antéversion exagérée) ou une agénésie de la glène.
12
Lésion de la tête humérale
L'encoche humérale postéro supérieure: appelée encoche de Malgaine ou de Hill
Sachs; c'est une fracture par impaction de la glène allant de la simple abrasion
cartilagineuse jusqu'au cratère osseux.
Dysplasie humérale: c'est une lésion congénitale d'orientation de la tête humérale. La
réduction de l'angle rétroversion de la tête ou l'antétorsion exagérée de l'humérus peut
prédisposer à l'instabilité.
Lésions musculaires
Elles correspondent à un dysfonctionnement des muscles péri-articulaires (en
particulier le sub-scapulaire) (fig. 12).
Fig. 12 : Coupe transversale de l’articulation scapulo-humérale gauche avec les
muscles péri-articulaires d’après Kamina [26]
5.
muscle grand pectoral
6. muscle infra-épineux
6.
muscle grand dorsal
7. scapula
7.
muscle grand rond
8. long chef du biceps brachial
8.
muscle subscapulaire
9. muscle deltoïde
9.
muscle petit rond
13
Rappels biomécaniques [58]
L'articulation scapulo-humérale est l’articulation du corps humain qui possède le plus de
mobilité. A la différence du cotyle, la glène n'assure pas une stabilité intrinsèque. Plusieurs
facteurs statiques et dynamiques travaillent en synergie pour assurer le couplage
biomécanique stabilité-mobilité. On distingue deux mécanismes qui sont importants pour la
compréhension de l'instabilité scapulo-humérale
1. Concavité- compression (fig. 13)
Ce concept fait référence à la stabilité que l'on attribut à un objet convexe se trouvant en
compression dans une surface concave. La compression dynamique de la tête humérale dans
la cavité glénoïdienne est assurée par les muscles de la ceinture scapulaire.
Une relation linéaire est établie entre l'importance de la concavité de la glène et la stabilité de
l'épaule ; en conséquence, elle est compromise si la glène est petite ou plate ou s'il existe une
désinsertion du bourrelet ou une diminution de la concavité par une fracture.
La concavité de la glène est importante dans l'axe supéro-inférieur. Ainsi, la stabilité sera plus
importante dans la direction supéro-inférieure.
Fig. 13 : Les différentes forces concourant au bon centrage de la tête humérale d’après Dufour
[21]
Da : composante axiale (ascensionnelle du deltoïde)
R1 : résultante de Da+Sea
Ra : résultante du plaquage du deltoïde sur le tubercule majeur
R2 : résultante de R1+Ra
Sea : composante axiale du supra-épineux
Add : action des adducteurs
14
2. L'équilibre scapulo-huméral
Il fait référence au principe de l'équilibre de la tête humérale à l'intérieur de la glène lorsque la
résultante des forces compressives passe dans la fossette glénoïdienne. En effet, au cours des
mouvements physiologiques de l'épaule, les contractions coordonnées des muscles périscapulaires (fig. 12 et 14) agissent :
-
d'une part sur la position du bras dans l'espace,
-
d'autre part sur la compression de la tête humérale dans la glène.
Elles sont capables de positionner la glène de telle sorte qu'elles puissent équilibrer la
résultante des forces au niveau de l'articulation.
En conséquence, un équilibre dynamique musculaire est une cause potentielle d'instabilité.
A. début de l’abduction
B. fin de l’abduction
1. muscle deltoïde
2. muscle supra-épineux
Fig. 14 : Rôle biomécanique des muscles supra-épineux et deltoïde dans l’abduction du bras
d’après Kamina [26]
Ces mécanismes biomécaniques contribuent à la compréhension de la pathologie de la
luxation récidivante et de la stratégie thérapeutique.
15
Diagnostic [34.36.45]
1. L'Interrogatoire
Elle précise :
- le mécanisme et le traitement de la luxation initiale
- la date de la première récidive, son intervalle libre, les facteurs déclenchants ou
favorisants, son mécanisme et son traitement
- le nombre total de récidive, et l'intervalle entre les récidives
- la symptomatologie de l'épaule en dehors des récidives : douleurs, ressaut, blocage,
instabilité, manque de force.
2. L’examen clinique
Il doit être méthodique, comparatif et recherche :
L'aspect, la trophicité, la force musculaire, l’intégrité ou l’atteinte du nerf circonflexe, et les
amplitudes articulaires (active et passive) de l'épaule peuvent être normaux ou en revanche,
l'instabilité antérieure symptomatique peut être mise en évidence par les tests suivants :
- Instabilité antérieure: par
Le test d'appréhension ou signe de
l'armé : l'examinateur est derrière le patient
assis:
En
partant
de
la
position
à
90°d'abduction, coude fléchi, le bras est
progressivement ramené en arrière. Au-delà
d'un certain seuil, le patient résiste par
crainte de voir se reproduire l'instabilité
16
Relocation test ou test de recentrage :
il s'agit de la recherche du même signe mais
sur un patient allongé. Au moment de la
survenue de l'appréhension, l'examinateur
imprime
alors
une
translation
antéropostérieure sur la tête humérale (ce qui
recentre l'articulation glénohumérale), faisant
disparaître l'appréhension
- Recherche d'une laxité
Manœuvre de Rodineau : le sujet est
penché en avant, bras pendant, l’examinateur
est placé derrière le sujet. Il stabilise d’une
main l’omoplate, et l’autre main recherche
une mobilité antéropostérieure de la tête
humérale, par rapport à la glène .Ce test doit
être comparé à celui du côté opposé
Sulcus sign de Neer ou signe du sillon: on essaie
cette fois de "décoapter" l'articulation glénohumérale
afin de créer un vide sous l'acromial (ou sillon)
Le patient est assis avec le bras relâché sur le côté ;
l’examinateur tire le bras vers le bas. Le test est positif
quand un sillon apparaît sous l’acromion et traduit une
laxité inférieure
17
3. Examens paracliniques[ 5]
L’imagerie est fondamentale dans les instabilités de l’épaule.
3.1. Les radiographies standards
Elles permettent un diagnostic des lésions osseuses. Ces radiographies doivent être
bilatérales et comparatives.
Clichés statiques: comportent de manière systématique :
 Technique :
- Un cliché de face en double obliquité : en rotation intermédiaire, interne et
externe ;
- Un profil glénoïdien de Bernageau ;
- Un profil axillaire.
 Résultats :
-
Le cliché de face en rotation intermédiaire visualise:
1. acromion
10. sommet de la coracoïde
2. bec de l’acromion
11. glène
3. espace acromio-huméral
12. col de la scapula
4. col anatomique
13. côte
5. trochiter
14. col chirurgical
6. interligne scapulo-huméral
15. trochin
7. clavicule
16. gouttière bicipitale
8. épine de l’omoplate
17. cintre scapulo-huméral
9. pied de la coracoïde
18. diaphyse humérale
-Le cliché de face en rotation interne visualise l’encoche de Malgaine ou de
Hill Sachs (il peut s'agir de véritable fracture, d’ostéolyse, de condensation, de
simple encoche ou de coups de hache suivant l’importance du traumatisme et le
caractère récidivant). Le cartilage peut être lésé isolément sans effraction sous
chondrale; une fracture du trochiter peut être associée
- Le cliché de face en rotation externe montre le bâillement supérieur de
l’interligne gléno-humérale signe d’une instabilité antérieure de la tête
humérale
18
-Le profil glénoïdien de Bernageau :
C’est un profil de l’omoplate avec le bras en élevation complète, effectué avec
un rayon descendant d’environ 20 à 30°. Il analyse le rebord antérieur de la
glène, recherche les fractures, les éculements, et les arrachements ostéoligamentaires
1. rebord antéro-supérieur de la glène
5. clavicule
2. glène
6. tête humérale
3. rebord antéro-inférieur de la glène
7. acromion
4. coracoïde
8. scapula
-Le profil axillaire permet de mettre en évidence :
1. trochin
7. diaphyse humérale
2. coracoïde
8. côte
3. tête humérale
9. articulation scapulo-humérale
4. clavicule
10. glène
5. articulation acromio-claviculaire
11. épine de la scapula
6. acromion
Clichés dynamiques
Ils complètent le bilan statique avec des clichés :
-Soit une face en rotation intermédiaire avec traction du bras vers le bas, à la recherche
d’un tiroir inférieur ;
- Soit un profil glénoïdien à la recherche d’un tiroir antérieur.
19
3.2. Autres imageries
L’Arthrographie
 Technique : utilisant un produit de contraste opaque hydrosoluble après
réalisation des clichés de face et de profil. C’est un examen invasif avec
beaucoup de faux positifs et de faux négatifs
 Résultats : l’arthrographie permet une étude
- du bourrelet glénoïdien, des structures capsulo-ligamentaires et des
surfaces cartilagineuses
- du tendon du long biceps
- et de la coiffe des rotateurs.
Le scanner
Il est nécessaire que lorsque la radiologie conventionnelle a été négative ou peut être
effectué de façon systématique dans un but de recherche.
Il permet de :
- Rechercher des facteurs anatomiques de l'instabilité,
-Mesurer la rétroversion de la glène, la rétrotorsion de la tête humérale,
- Rechercher une dysplasie antéversante de la glène.
Cet examen est amélioré par l’arthroscanner qui combine les avantages de
l'arthrographie à ceux du scanner avec une analyse :
- des parties molles péri articulaires,
- des surfaces cartilagineuses,
- des bords antérieurs et postérieurs la glène,
- et surtout des lésions du complexe gléno-huméral inférieur.
L'IRM (ou imagerie par résonance magnétique)
Elle est moins performante que le scanner. Elle permet de dépister les lésions des
muscles de la coiffe des rotateurs dans les instabilités après 40 ans.
Cet examen est amélioré par l’arthro-IRM. Il est indiqué dans le cadre d’un bilan plus
global pour :
-
Apprécier l’importance des lésions capsulo-ligamentaires, du bourrelet glénoïdien
et surtout de la coiffe des rotateurs ;
-
Une analyse fine des ligaments gléno-huméraux.
20
Le traitement
1. Les buts du traitement
- Restaurer une fonction normale de l’épaule ;
- Prévenir les récidives ;
- Eviter l’apparition de douleur et de raideur articulaire
2. Les moyens et méthodes
2.1. Le traitement non chirurgical [18.43.63]
Il consiste en :
- Une réduction si possible sous anesthésie générale ;
- Une immobilisation coude au corps à des fins purement antalgiques en associant à un
traitement antalgique per os. A ce stade, il ne faut pas espérer une cicatrisation
lésionnelle car les lésions se sont constituées dès le premier épisode d’instabilité. Les
accidents mineurs d’instabilité (exemple : une subluxation), sont toujours auto-réduites
et ne nécessitent pas d’immobilisation stricte.
2.2. Le traitement chirurgical
De nombreuses interventions ont été décrites pour traiter les instabilités antéro-internes de
l’épaule. Elles peuvent se classer en 2 grands groupes :
- les réparations osseuses ;
- les réparations capsulo-ligamentaires.
Les réparations osseuses: ce sont les interventions de type butée. Elles consistent à
réaliser une butée osseuse pour augmenter les possibilités contentives de la glène en
agrandissant sa surface le plus souvent réduite par un éculement ou une fracture dans
sa partie antéro-inférieure ou au moins barrer l’accès du défilé omocoracoïdien.
Selon la nature du greffon, on distingue plusieurs techniques:
La technique de Latarjet [ 18, 43, 63]
Principe : se servir du processus coracoïde pédiculé sur le coraco-biceps
pour réaliser une butée antéro-inférieure glénoïdienne qui :
- Efface la chambre de décollement de Bankart,
21
-Participe au renforcement de la sangle fonctionnelle musculaire par
transfert
du
coracobiceps
et
au
com :blement
de
l'espace
omocoracoïdien.
L’anesthésie : La voie générale est toujours la voie indiquée
Installation :
L’opéré est en décubitus dorsal ou en
position demi assise, le côté opéré est
soulevé par un cousin sous le bord
spinal de l’omoplate la tête tournée
vers le côté opposé ; un grand jersey
stérile enveloppant tout le membre
supérieur
Abord :
La voie antérieure delto-pectorale est la plus
utilisée. L’incision de 10cm, verticale, allant
de la pointe de le processus coracoïde jusqu'à
l'insertion du grand pectoral, le long du bord
médial du deltoïde.
Clivage de l'espace delto-pectoral dont le
repère est la veine céphalique. On récline le
muscle deltoïde et la veine céphalique en
dehors et le muscle grand pectoral en dedans.
22
L'incision de l'aponévrose clavi-pectoroaxillaire,
expose
le
sous-scapulaire
en
dedans, le tendon du long biceps en dehors.
Gestes
Préparation de la coracoïde
- On fore dans sa portion horizontale, un ou deux pré trous centraux à la
mèche 3.5mm
- On sectionne le ligament acromio-coracoÏdien en dehors et le muscle
petit pectoral de son bord interne
- On réalise l'ostéotomie de la coracoïde en débordant un peu sur sa
portion verticale
- La coracoïde pédiculée sur le coraco-brachial est réclinée en bas, en la
libérant progressivement sans léser le nerf musculo-cutané
- Ouverture du subscapulaire plus capsulotomie
Le subscapulaire est sectionné soit complètement soit en U ou L à la
jonction des fibres tendineuses le bras en rotation externe.
Préparation de la glène: avivement du bord antéro inférieur de la glène
jusqu'au tissu spongieux
Fixation
La coracoïde est moulée sur la glène couchée, doit
affleurer le cartilage et ne pas le dépasser,après avoir
jaugé la profondeur du trou foré, elle doit être placée sur
son pôle antéro inférieur et fixée par une ou deux vis
bicorticales généralement 40 à 45mm. Ces vis sont les
vis à malléole, à corticale ou à spongieuse dont le
diamètre est de 3,5 ou 4 ,5 mm
23
Fermeture
On suture la capsule ; le sub-scapulaire est suturé, le membre en rotation externe
fonctionnelle de 30° par les points en x sans paletot ensuite, on ferme le sillon
deltopectoral.
Luxation de l’épaule (avant et après
réduction)
Epaule stabilisée
par un Latarjet à
deux vis consolidé
Autres techniques
 La technique de triple verrouillage de Patte: cette technique complète
celle de Latarjet ; au double verrouillage osseux et musculaire, son
auteur Didier Patte ajoute un 3ème verrouillage capsulaire obtenu en
suturant la capsule inféro-externe distale sur la partie proximale latérale
du coraco-biceps et sur le moignon de ligament acromio-coracoïdien
conservé sur la butée coracoïdienne.
 Le technique de Trillat [ 18.63] : utilise la coracoïde, mais celle-ci
est sectionnée à sa base, basculée vers le bas et fixée sur la face
antérieure de la glène
.
 La technique de la butée costale armée de Gosset [18.63] : c’est une
butée costale prélevée à partir de la partie moyenne de la 4e côte sur une
longueur de 5 à 6 cm. Elle est souvent trop saillante avec des risques de
morbidité importante tels que le pneumothorax.
24
 La technique d'Eden et Hybbinette : utilise un greffon iliaque
cortico-spongieux pré-glénoïdien débordant en
avant du rebord
antérieur de la glène.
.
 La technique d’Oudard : utilise l’interposition d’un greffon tibial et
consiste à fermer le défilé omo-coracoïdien par un allongement
ostéoplastique de la coracoïde.
 L’ostéotomie du col huméral: c'est une ostéotomie métaphysaire
transversale de rotation externe qui doit être associée à une Putti-platt
pour accroître la rétroversion de la tête humérale. Elle permet d'éviter
l'accrochage en rotation externe de l'encoche céphalique de Malgaine.
La fixation se fait par une plaque demi- tube.
Les réparations capsulo-ligamentaires [16.63]
Réalisée antérieurement à foyer ouvert, elles ont bénéficié de l’avènement de
l’arthroscopie [5.7.17] actuellement en plein développement. Cependant la récidive post
arthroscopique semble plus importante que post chirurgie classique.
Cette technique permet de supprimer la lésion de Bankart et de restaurer la tension
capsulaire.
Il y a plusieurs techniques :
L’intervention de Bankart: elle consiste à réaliser une cure radicale du
décollement sous capsulo-périosté de Broca par réinsertion transosseuse de la
capsule et du bourrelet au bord antérieur de la glène.
Le Bankart présente un taux de morbidité faible par contre développe un taux
de récidive plus important. Naguère pratiquée à foyer ouvert, il se pratique de
plus en plus à foyer fermé sous arthroscopie.
L’intervention, à foyer ouvert, est réalisée par voie deltopectorale et se déroule
en plusieurs phases :
25
-Préparation du muscle subscapulaire en le disssociant et le séparant de
la capsule.
- Capsulotomie près du bord antérieur de la glène.
- Exploration de l’état de la glène, du bourrelet, de la poche souscapsulo-périostée.
- Préparation de 3 ou 4 points trans-osseux à travers le bord antérieur de
la glène et dans la lèvre externe de la capsule ;
- Serrage des fils le bras en rotation interne.
- Et suture du muscle subscapulaire.
26
Autres techniques :
 Capsulorraphie: cette technique est caractérisée par deux points.
- L’incision externe de la capsule permettant une vue des lésions et une
suture aisée à la fin de l’intervention.
- Un effacement et une retente
capsulaire par un vissage antéro
postérieur.

Capsulo-myorraphie
antérieure :
c’est
une
diminution
du
subscapulaire afin de limiter la rotation externe.
 Capsulo- myorragraphie postérieure: elle consiste à combler
l'encoche de Malgaine par le tendon infrasupinatus qui est sectionné à
1cm en dedans de son insertion trochitérienne puis y est réinséré par des
points trans-osseux.
 La technique de Putti- Platt: c’est une capsulo- myorragraphie avec
section verticale en un seul temps de la capsule et du subscapulaire
avec le bras en rotation interne.
 La technique de Magnuson: elle consiste à transplanter le tendon
terminal du subscapulaire détaché avec une pastille osseuse du trochin,
au bord externe de la gouttière bicipital ; afin de limiter la rotation
externe de 20 à 30°
3. Indications
L’indication thérapeutique est posée lorsque les luxations entraînent un handicap fonctionnel,
socio-professionnel, important tels des syndromes douloureux permanents et/ou des récidives
de plus en plus fréquentes.
27
Matériel et Méthodes
1. Cadre d'étude
Ce travail a été réalisé dans les services d'Orthopédie et de Traumatologie des hôpitaux
Aristide Le Dantec (HALD) et Général de Grand-Yoff (HOGGY) de Dakar.
Ces deux centres hospitaliers à vocation universitaire représentent deux des trois formations
hospitalières de référence dans la prise en charge de la pathologie orthopédique et
traumatologique du pays. Les chirurgiens titulaires qui prennent en charge ces malades sont
constitués de trois professeurs et de neuf assistants.
2. Matériel d'étude
Il s'agissait d'une étude prospective portant sur 24 cas, étalée sur quatre ans, de Janvier 2003 à
Décembre 2006.
Nous avons inclu tous les patients qui avaient une luxation récidivante antérieure de l'épaule
et traitée chirurgicalement selon la technique de Latarjet et ayant un suivi post opératoire
complet d’au moins 6 mois.
La population d'étude concernait 22 hommes et 2 femmes âgés en moyenne de 32 ans avec
des extrêmes de 21 ans et de 40 ans au moment de l'intervention. La lésion concernait 20 fois
le côté droit, 4 fois le côté gauche. Tous les patients étaient droitiers. Les circonstances étaient
réparties ainsi :
Répartition des circonstances
8%
4%
accident sportif
8%
accident domestique
accident de travail
8%
55%
accident de circulation
agression
17%
crise épileptique
28
Lors du premier accident, il s'agissait d'une luxation vraie dans 84,5% de cas avec un contexte
traumatique le plus souvent (85,8% des cas). Dans 10,5% des cas, le patient avait des
sensations de ressaut et dans 5% des cas une épaule douloureuse.
La première luxation a été réduite ainsi :
Traitement du premier épisode
8%
21%
à l'hôpital
par l'entourage du patient
par un rebouteux
71%
Quand la luxation a été réduite à l'hôpital (17 cas), l'épaule fut immobilisée dans tous les cas
dans un mayo clinic dans (16cas) et dans une écharpe dans (1cas) pendant une durée de 21
jours. Aucun des patients n'a été rééduqué.
Le nombre de récidives de luxation se situait au-dessous de :
-
5 fois dans 52,4% des cas ;
-
Entre 5 et 10 fois dans 24,21% des cas ;
-
Et au-dessus de 10 récidives dans 22,1% des cas.
Le temps écoulé entre la luxation initiale et la première récidive était en moyenne de 11 mois
(extrêmes : 4 mois et 24 mois). Le délai moyen entre la première luxation et l'intervention
était de 25 mois (extrêmes : 11 mois et 54 mois). La majorité des patients souffrait
d'appréhension (51,2%) ou de sensation d'instabilité (48,8%).
La douleur n'était pas au premier plan, puisque 70,8% des patients n'avaient aucune
symptomatologie douloureuse et 29,2% des patients des douleurs uniquement aux
mouvements forcés ou pendant le travail.
Sur l'ensemble des malades que nous avons examinés, les amplitudes étaient sensiblement
normales. L'examen clinique à la recherche des signes objectifs d'instabilité :
-
Le test d'appréhension était positif dans 83,3% des cas.
29
-
Un tiroir antérieur fut retrouvé dans 32,8% des cas mais non recherché dans 44,9% des
cas.
A la radiographie standard, on avait retrouvé :
Réparition des lésions pré-opératoires
aucune fracture
encoche de Malgaine
8%
8%
31%
4%
fracture de la glène
fracture du trochiter
15%
34%
éculement de la glène
calcification au niveau de
la glène
En conclusion sur les clichés préopératoires, l'instabilité a été considérée comme documentée
lorsqu'il existait au moins l'un des trois critères suivants:
- une image de l'épaule luxée ;
- une encoche humérale postérieure ;
- un remaniement glénoïdien dans sa partie antéro-inférieure.
Tous les patients avaient été opérés par la technique princeps de la butée coracoïdienne selon
Latarjet avec section du subscapulaire selon la technique de Weaver [46], associée plus ou
moins au 3ème verrou de Patte à savoir :
- Butée osseuse constituée par la coracoïde vissée au devant de la partie antéro-inférieure
de la glène
- Renforcement de la sangle musculaire antérieure par l'effet hamac- rétention capsulaire
inférieure sur le coraco-biceps.
- Et suture du lambeau capsulaire externe sur la tranche du ligament acromiocoracoïdien de la butée
Les malades avaient été opérés par différents chirurgiens titulaires (professeurs et assistants)
La synthèse, pour fixer le greffon coracoïdien, avait été réalisée par une vis 3,5 ou 4 ,5 dans
78% des cas et deux vis dans 22% des cas. Aucune complication per-opératoire n'a été
observée. Les patients ont été immobilisés dans un mayo clinic pendant 21 jours.
Nos malades avaient été rééduqués selon le protocole suivant :
-J0-J2 : antalgiques, anti-inflammatoires, antibiotiques,
immobilisation par le mayo clinic
30
mobilisation du coude et de la main
-J3-J5 : antalgique, anti-inflammatoires, antibiotiques,
mobilisation passive en abduction dans le plan de l’omoplate
contractions isométriques
-Dès le 10ème jour la douleur ne doit plus être une préocupation
-3ème semaine : Ablation du mayo clinic
-Jusqu’à la 6ème semaine : mouvements passifs auto-assistés dans le plan de l’omoplate,
contrations isométriques,
élévation à 150° en passif à la 6ème semaine ( couché).
la 6ème semaine : Mouvements actifs sans résistance : travailler les amplitudes en
-Dés
élevation dans le plan de l’omoplate, ne pas travailler les rotateurs.
-8ème-12ème semaine : mouvements actifs avec résistance progressive, avec pour but d’obtenir
150° d’élévation associée à 40° de rotation externe
Elévation active complète à trois mois
-Dès le 6ème mois : reprise progressive de sport (tennis, golf, natation, jogging), éviter le sport
de contacts ( foot-ball, hand-ball, basket-ball, lutte)
-Reprise de toutes les activités à une année
A la révision, des clichés radiologiques standards (incidence de face en position neutre et un
profil glénoïdien type Bernageau ont été réalisés.
Nous avions apprécié le greffon en analysant les paramètres suivants:
* Une lyse (absente, inférieure à 50%, supérieure à 50%) ;
* Sa consolidation ou sa pseudarthrose ;
* Sa position dans le plan axial, transverse et coronal.
3. Méthode d'évaluation
Toutes les plaies opératoires avaient cicatrisé en première intention au bout de quinze jours en
moyenne avec des suites opératoires simple.
L’évaluation fonctionnelle des deux épaules effectuées simultanément avait été faite par deux
scores:
 le score de Constant [6] qui affecte :
- Aux deux premiers paramètres subjectifs 35 points avec :
*15 points à la douleur ;
*20 points au niveau d'activité quotidienne.
- Aux deux paramètres objectifs 65 points avec :
31
*40 points à la mobilité active ;
*25 points à la force musculaire.
La valeur maximale du score de Constant était exprimée en valeur absolue de 100
points. Le résultat était évalué en fonction de la différentielle entre les deux épaules :
- Excellent pour une différentielle inférieure ou égale à 5.
- Très bon pour une différentielle inférieure ou égale à 10.
- Moyen pour une différentielle inférieure ou égale à 30.
- Mauvais pour une différentielle supérieure à 30.
 la cotation selon la fiche du groupe Duplay [62] : était étudiée selon la cotation
"Instabilité antérieure de l'épaule" de Rowe modifiée par G. Walch et le groupe
Duplay [62], basée sur quatre critères :
-La fonction (le sport est pris en compte ou l'activité quotidienne si le patient
n'est pas sportif).
- La stabilité (la récidive vraie cotée en points négatifs (-25points)).
-Les douleurs.
- La mobilité : l'abduction, les rotations externes (RE1 et RE2), la rotation
interne (RI).
Le résultat objectif global est noté sur 100 points:
*25 points pour la fonction ;
*25 points pour la stabilité ;
*25points pour la douleur ;
*25points pour la mobilité.
Le résultat est jugé:
- Excellent si compris entre 90 et 100 points.
- Bon si compris entre 75 et 89 points.
- Moyen entre 51 et 74 points.
- Mauvais, s'il est inférieur à 50 points.
L'existence d'une hyperlaxité capsulaire a été appréciée par le test du sillon [45.]
L’arthrose scapulo-humérale, jugée selon les critères de Samilson [53], a été
appréciée sur la radiographie de l’épaule de face en position neutre ; la taille de
l’ostéophyte est mesurée dans sa plus grande dimension, en général horizontale.
Seuls les stades 2 et 3 sont considérés comme de véritable stade arthrosique.
32
Tableau I: Montrant les différents stades de l’omarthrose
Stades Description
0
pas d’ostéophytose
I
ostéophytose humérale mesurant moins 3mm sans modification de l’interligne
II
ostéophytose humérale mesurant entre 3 et 7 mm avec une minime irrégularité de l’interligne
III
ostéophytose humérale mesurant plus de 8mm avec un pincement et une ostéocondensation
de l’interligne
33
Résultats
1. Sur la plan fonctionnel
1.1. Selon le score de Constant [6]
 Sur le plan subjectif
La satisfaction subjective était appréciée en analysant la réponse des patients
aux deux questions suivantes :
- Etes-vous satisfait?
- Et vous feriez-vous réopérer?
Ainsi :
- 71% de nos patients se disaient très satisfaits ;
- 20% étaient satisfaits ;
- 9% étaient hésitants et mécontents.
 Sur le plan objectif
Au total, on a un score de Constant moyen de 91,6 points avec une cotation
différentielle donnant :
- 4 excellents cas soit 17% ;
- 9 très bons cas soit 39% ;
- 5 bons cas soit 22% ;
- 3 cas moyens soit 13% ;
- 2 mauvais cas soit 9%.
Résultat selon le score de Constant
9%
17%
13%
excellents
très bons
bons
moyens
22%
39%
mauvais
Fig. 15 : Résultats selon le score de Constant [6]
34
1.2. Selon le score de Duplay [62]
 Par rapport à la fonction
- 78% des patients ne présentaient aucune gêne fonctionnelle dans la vie
quotidienne ;
- 12,5% avaient une gêne professionnelle et/ou sportive ; tandis que 87,5% des
patients avaient repris une activité sportive et/ou quotidienne (les patients ont
repris leurs activités sportives pour les sportifs ou leurs activités quotidiennes
pour les non sportifs au cinquième mois post opératoire en moyenne) ;
- 32% de patients pratiquaient toujours le même sport de compétition contre
42% en préopératoire dont 63% des patients pratiquaient toujours le même
sport au même niveau ;
-12% des patients pratiquant un sport à risque (type 3 ou type 4 Duplay),
susceptible d’être à l’origine des chutes, tel que le judo, la lutte affirmaient
avoir changer de sport.
 Par rapport à la stabilité
- 79% des patients n’avaient aucun retentissement sur leur épaule et avaient
repris leurs sports ou leurs activités professionnelles
- 17,6% conservaient une appréhension.
 Par rapport à la force
- la force était normale chez 68% des patients ;
- 24% présentaient une fatigabilité à l’effort par rapport au côté opposé.
(20 patients sur 24 ont bénéficiés de la mesure de la force au dynamomètre)
 Par rapport à la douleur
- 79% de patients sont totalement indolents ;
- 17% se plaignent de douleurs dans les gestes de force ;
- 4% de douleurs dans la vie quotidienne.
 Par rapport à la mobilité
Quelque soit le secteur de mouvement étudié, les amplitudes étaient moins
bonnes du côté opéré avec un déficit moyen de :
-12° en abduction ;
-10° en RE2 (rotation externe, coude au corps) ;
35
-14° en RE1 (rotation externe à 90% d’abduction) ;
- en RI (l’épreuve main-dos est limitée de la valeur d’une vertèbre) :60% des
patients avaient une mobilité normale avec un test d’appréhension positif dans
17,6% de cas.
Le score de Duplay moyen était de 18 points sur 25 avec 77% d’excellents à
bons résultats à la révision avec :
- 20% de résultats excellents ;
- 57% de bons résultats ;
- 14,7% de résultats moyens ;
- 8,3% de mauvais résultats.
Résultats selon le score de Duplay
8,30%
20%
14,70%
excellents
bons
moyens
mauvais
57%
Fig. 16 : Résultats selon score de Duplay [62]
2. Sur le plan anatomique
2.1. Aspect de la butée : nous avions jugé à la révision que les butées présentaient :
-Une fusion dans 91,6% de cas (n=22),
- Une lyse supérieure à 50% dans 4.1% de cas (n=1),
-Une pseudarthrose dans 4.1% de cas (n=1).
2.2. Etat articulaire selon Samilson
- 95,9% nos patients étaient au stade 0 de Samilson (n=23);
- 4,1% de nos patients présentaient une omarthrose au stade II de Samilson (n=1).
36
3. Complications
Nous n’avons pas noté de cas d’infection superficielle ou profonde, ni d’atteinte nerveuse
secondaire.
Cependant, il y avait 2 patients qui présentaient une instabilité post-opératoire dont un cas
de récidive avérée, et un cas d’accident mineur d’instabilité.
37
Discussion
Elle porte sur l’appréciation globale des résultats, sur la recherche et l’interprétation des
échecs et enfin sur la comparaison de la méthode de Latarjet avec les autres techniques de
stabilisation de l’épaule dans les instabilités antérieures.
1. Appréciation globale
Nos patients, à l’image de ceux de COLLIN [5], se déclarent satisfaits de leur traitement
puisqu’ils ont retrouvé stabilité, fonction et indolence.
A partir des cotations de CONSTANT [6] et DUPLAY [62], notre appréciation est très
favorable. La stabilisation de l’épaule selon la technique de la butée ostéoplastique de
Latarjet, comme en témoignent les tableaux II et III et, permet aux patients une reprise
effective d’activité.
Tableau II : Résultats comparés selon le score de Constant [6]
Série
Excellent
Bon
Moyen
Mauvais
Collin [5]
74 cas
40%
45%
6%
9%
Goutallier [12(]
350 cas
34%
40%
18%
8%
Levigne [30]
52 cas
33%
41%
22%
4%
Taouil [58]]
17 cas
12%
64%
12%
12%
Notre série
24 cas
16.6%
62.5%
12.5%
8.3%
Tableau III : Résultats comparés selon le score de Duplay [62]
Série
Excellent
Bon
Moyen
Mauvais
Collin [5]
74 cas
18.8%
49.2%
20.2%
10.1%
Huguet [25]
276 cas
31%
38.75%
18.75%
11.5%
Notre série
24 cas
20%
57%
14.7%
8.3%
Nous n’avons déploré aucune complication infectieuse, qui, selon la littérature [18, 31, 50]
retrouve un taux variant de 0 à 6%.
Nous n’avons non plus déploré de lésion du nerf musculo-cutané, pourtant classiquement
décrite par Flatow [10]. La parésie est due à une traction sur le nerf lors de la préparation de la
butée ou lors d’une dissection exagérée vers le bas du bord interne du coraco-biceps.
38
2. Les échecs
Nous en avons répertorié trois qui ont grevé nos résultats.
2.1. La récidive
La récidive représente 2/3 des échecs selon HAWKINS [22] et se manifeste selon trois
modes : la récidive vraie, les accidents mineurs d’instabilité et la luxation dans une
autre direction.
 Le pourcentage de récidive vraie après chirurgie de l’instabilité antérieure est
variable selon les séries et selon que le geste ait été effectué à ciel ouvert (inférieur à
5% [18, 37, 52, 62]) ou per arthroscopique (entre 10 à 20% [14, 20]).
Les circonstances de survenue sont de deux ordres :
-
Soit elle est précoce, atraumatique, en général lors d’un mouvement
d’armé [51.61]
- Soit elle est tardive, traumatique, après une longue période d’instabilité [51. 61. 62]
Les causes de cette récidive varient et s’échelonnent dans le temps :
-En préopératoire, on incrimine plutôt des erreurs de diagnostic comme une instabilité
multidirectionnelle ou une instabilité postérieure [52] ;
-
Lors de l’intervention, il s’agit :
o Soit d’une insuffisance de correction de la lésion anatomique [ 61] avec
essentiellement une butée haute ne fermant pas le défilé omo-coracoïdien,
une butée trop médiane, fracturée ou tardivement présentant une
pseudarthrose voire une lyse ;
o Soit de lésions anatomiques en rapport à la chronicité de l’instabilité [2] à
savoir un gros défect antérieur au niveau de la glène, une profonde encoche
de Hills-Sachs, une rupture du subscapularis ou une hyperlaxité par
distension de l’intervalle des rotateurs.
-
En post opératoire, l’absence ou l’insuffisance de l’immobilisation avec
mobilisation hasardeuse et précoce avant consolidation de la butée, mais
également la survenue d’un traumatisme [51].
 Les accidents mineurs d’instabilité : il s’agit, selon Walch [61], d’une instabilité
résiduelle antérieure post opératoire perçue comme une sensation d’épaule qui glisse
en avant à la fin d’un mouvement de lancer ; elle est différente du mécanisme de
subluxation habituelle lors de l’armé.
39
Sont inclus dans ces accidents les patients se plaignant de subluxation mais aussi ceux
chez qui l’examen met en évidence un test d’appréhension positif.
Pour Walch [61], cette instabilité antérieure résiduelle est due au fait que la coracoïde
est insuffisamment plaquée.
Walch [61] et Hawkins [22] retrouvent les mêmes facteurs qui ont prévalu aux
récidives complètes, à savoir une erreur technique, une fracture de la glène ou une
hyperlaxité ligamentaire.
Leur méconnaissance pourrait faire penser à un défaut technique [61].
 La luxation dans une autre direction : cette éventualité est évoquée par Walch [61]
dans 5% des échecs d’instabilité. Il envisage plusieurs explications mais surtout une
erreur diagnostique du sens de l’instabilité.
Sallerin [52] trouve que sur 20 luxations et subluxations postérieures de l’épaule, 3
patients ont fait l’objet d’une stabilisation antérieure sans qu’aucune preuve
(interrogatoire, examen clinique, bilan radiologique) n’ait authentifié le sens de
l’instabilité initiale.
Nous n’avons pas objectivé ce type d’échec dans notre série.
Tableau IV : Résultats comparés de l’instabilité
Soo [30]
Walch [61]
Collin [5]
Notre série
(1999)
(1991)
(2007)
(2008)
Nombre de cas
149
102
74
24
Stablilité
73.6%
72%
57%
70%
Appréhension
20.3%
17%
34%
17.6%
Instabilité
0 .7%
4%
3%
4.1%
Récidive
5 .4%
7%
6%
4.1%
2.2. Epaule stable mais douloureuse
On classe ces épaules douloureuses en fonction du délai de survenue.
Initialement, la douleur est en rapport soit avec des vis longues intra-canalaires [62] ou
de rupture avec migration [23. 43 62] soit avec une pseudarthrose ou un débord de la
butée [64]. Hooclins [23] rapportent des cas de reprises chirurgicales pour vis trop
longues.
40
Ces douleurs peuvent être également intriquées à une raideur ou à une instabilité. Il
faudrait éliminer les autres causes de scapulalgie qu’il s’agisse de tendinopathies de la
coiffe ou du long biceps voire de pathologie acromio-claviculaire.
Tardivement, la douleur peut être due à l’omarthrose. En cas d’omarthrose, les
douleurs surviennent lors des mouvements répétitifs. Seules les arthroses type II et III
selon Samilson sont douloureuses. Les facteurs incriminés dans la survenue de
l’omarthrose sont le nombre d’accidents préopratoires d’instabilité (si supérieur à 10
épisodes), l’âge au moment de l’intervention [52. 59], le recul (si au-delà de 5 ans)
[18. 59] (Tableau 6) mais aussi la technique elle-même [47 56], le débord de la butée
[61], la survenue de récidive.
La fréquence de l’omarthrose lors de la stabilisation par la butée coracoïdienne est
diversement appréciée dans la littérature [3. 5. 18. 25. 38. 44].
Tableau V : Arthrose comparée dans la littérature
Huguet[25] Collin[5] Glorion[18] Soo[55] Picard[44]
Samilson
Vander-
Notre
Maren[3]
série
69%
90%
92%
64%
80%
85%
95,9%
25%
6%
-
27,5%
15%
12%
-
5%
-
8%
7%
5%
3%
4,1%
1%
4%
-
1,5%
-
-
-
O
Samilson
I
Samilson
II
Samilson
III
Tableau VI : Arthrose et recul [25]
Recul inférieur à 5ans
Recul supérieur à 10ans
Samilson 0
67.5%
47.2%
Samilson I
27.8%
32.1%
Samilson II
4%
17%
Samilson III
0.8%
3.8%
41
2.3. Epaule stable et raide
On retient le terme de raideur lorsqu’il y a une perte de RE1 supérieure à 30° par
rapport au coté opposé. Soixante pour cent de nos patients ont une mobilité normale.
Les travaux de la Société Orthopédique de l’Ouest (Soo) [55] a colligé 27 cas, soit un
taux global de 6%, dont 2 cas de raideur avec une RE1 à 0°. Dans notre série, la valeur
moyenne de la perte de RE1 est de 14° et de 10° en RE2. Un de nos patients avait
présenté une immobilisation post opératoire prolongée coude au corps avec une
rééducation insuffisante. L’autre présente une omarthrose au stade II de Samilson.
Les causes peuvent être non opératoires (capsulite rétractile, immobilisation coude au
corps prolongée, absence de rééducation ou omarthrose post instabilité) ou
essentiellement opératoires par conflit tête-butée, capsulomyoplastie « en paletot », par
pseudarthrose de la butée ou débord antérieur de la butée.
Pour prévenir ces raideurs de l’épaule, certains auteurs [20, 32] insistent sur la
restauration anatomique du subscapularis par une ouverture capsulaire selon Weaver
et sa suture à 20 degrés de rotation externe.
3-Comparaison avec les autres techniques de stabilisation
L’intervention de Latarjet est l’une des techniques de référence pour le traitement de
l’instabilité chronique de l’épaule. Bien que cette technique soit maîtrisée et procure
d’énorme satisfaction dans la stabilisation antérieure de l’épaule, nous nous sommes
proposés de comparer dans le tableau qui va suivre (Tableau VII), cette technique à
d’autres techniques qui ont montré leur efficacité, à savoir essentiellement la technique de
réparation capsulo-ligamentaire de Bankart qu’elle ait été effectuée à foyer ouvert ou perarthroscopique.
42
TableauVII : Comparatif des techniques de Latarjet et de Bankart
Bankart à foyer
Latarjet
ouvert
Réalisation
facile
Bankart
arthroscopique
difficile
Nécessite opérateur
entraîné
Cicatrice
esthétique+
esthétique+
esthétique+++
Stabilité
++
+++
++
+++
++
+++
++
+ Faible (1-3%)
post opératoire
Récupération
de la force
Récidive
+++ Elevée (1015%)
Raideur
++
+
+++
Risque de rigidité
post opératoire
Arthrose
+
++
+
Indolence
+++
++
+++
Coût
+
++
++
Chirurgie de
difficile
plus difficile
facile
risque élevé
risque élevé
Limitée (lavage
révision
Infection
articulaire)
Hospitalisation
+ ou - longue
+ ou - longue
plus courte
Immobilisation
longue durée
courte durée
longue durée
Rééducation
Parfois difficile
Facile et immédiate
Parfois difficile
post opératoire
Sport de
contact (hand,
+ ¨+
rugby, basket)
43
+++
++
L'instabilité antérieure récidivante de l'épaule est une symptomatologie chronique qui se
manifeste sous la forme d'une appréhension gênante de subluxation voire de luxation lorsque
le patient porte le bras en abduction rotation externe. Le traitement de la luxation récidivante
de l'épaule par la butée ostéoplastique type Latarjet constitue une méthode de traitement
proposée.
Le résultat du traitement, pour être satisfaisant, doit répondre au cahier des charges qui exige
une épaule fonctionnelle, indolore et stable. Les échecs de la stabilisation chirurgicale de
l’épaule sont peu fréquents.
Dans le but d’évaluer les échecs de notre technique chirurgicale, nous avons entrepris une
étude prospective étalée sur quatre ans, de Janvier 2003 à Décembre 2006, dans les services
d’Orthopédie-Traumatologie du CHU de Dakar, à savoir l’hôpital Aristide Le DANTEC et
l’hôpital général de Grand-Yoff. Nous avons ainsi suivi et évalué 24 cas de luxations
récidivantes de l’épaule traitées par la méthode de Latarjet. Il s’agissait de 24 patients, 22
hommes pour 2 femmes, dont l’âge moyen était de 32 ans. Tous nos patients étaient droitiers
et la lésion concernait plus le côté dominant (83%).
La voie d’abord delto-pectorale a été la seule utilisée. Tous les patients ont été opérés par la
technique princeps de la butée coracoïdienne selon Latarjet associée plus ou moins au 3ème
verrou de Patte à savoir :
- Butée osseuse constituée par la coracoïde vissée en positon affleurante sous équatoriale
au niveau de la glène.
- Renforcement de la sangle musculaire antérieure par l'effet hamac-rétention capsulaire
inférieure sur le coraco-biceps .
- Et suture éventuelle du lambeau capsulaire externe sur la tranche du ligament acromiocoracoïdien de la butée.
Le subscapulaire n’était jamais entièrement sectionné ; il était ouvert en « T inversé » ou
discisé dans le sens de ses fibres selon la technique de Weaver. Les malades étaient opérés par
différents chirurgiens titulaires. La synthèse, pour fixer le greffon coracoïdien, était réalisée
par une vis dans 78% des cas et deux vis dans 22% des cas. Aucune complication peropératoire n'était observée. Les patients étaient immobilisés dans un mayo clinic pendant 21
jours suivi d’une rééducation fonctionnelle systématique.
Les patients étaient évalués par trois scores : l’échelle de Constant, la cotation de Duplay et le
score de Samilson.
Globalement, nous avions obtenu :
- selon le score de Constant : 79.1% de résultat excellent, très bon résultat, et de bon
résultat ; 20.8% de résultat moyen, et de mauvais résultat.
44
- selon la cotation de Duplay : 77% de résultat excellent, et de bon résultat ; 23% de
résultat moyen, et de mauvais résultat.
Nous n’avions pas noté de cas de sepsis, ni d’atteinte nerveuse secondaire. Par contre selon le
score de Samilson appréciant la survenue d’une omarthrose, nous n’avons noté que 4.1% d’
omarthrose au stade II.
Les échecs répertoriés étaient :
- 2 cas d’instabilité résiduelle (8,2%) dont 1 cas de récidive post-opératoire , un des
patients présentait une lyse de butée et l’autre un débord de butée ;
- 9 cas de raideur (40%) avec une perte moyenne de RE1 de 14°dont 2cas avec une
perte de RE1 supérieur à 30° (le premier cas avait eu une immobilisation prolongée
avec une réeducation insuffisante et
le second cas, une omarthrose stade II de
Samilson) ;
- 5 cas de scapulalgie (21%), dont deux cas de vis débordantes en intra articulaire, un
cas d’omathrose, deux cas de raideur douloureuse.
A la lumière de notre expérience et celle rapportée dans la littérature, nous confirmons que la
technique de Latarjet est fiable et reste d’actualité surtout dans notre contexte d’exercice
marquée par la précarité du plateau technique. La stabilité est parfaitement maîtrisée par cette
technique ; cependant la douleur peut être due initialement à une faute technique puis
tardivement à l’omarthrose qui concoura à la survenue d’une raideur créant une association
délétère pour l’épaule. Une prise en charge rigoureuse, passant par un diagnostic correct
(éliminant les laxités multidirectionnelles), une technique opératoire parfaitement maîtrisée
(avec une section du subscapulaire selon Weaver) ainsi qu’un protocole de rééducation
fonctionnelle respecté, peut faire diminuer le taux des complications et des échecs.
45
RECOMMANDATIONS
La butée coracoïdienne reste une méthode de référence pour le traitement
d’instabilité chronique de l’épaule.
Pour répondre à cette efficacité :
-Les indications opératoires doivent être motivées, évitant les erreurs
d’indication telles que les laxité multidirectionnelles
-La section verticale complète du tendon subscapulaire doit être abandonnée au
profit de l’abord de Weaver préconisant une section incomplète de ce tendon
-Les erreurs de techniques sont à éviter
-La chirurgie doit être suivie par un protocole de rééducation rigoureuse
-Le Bankart arthroscopique doit être vulgarisé dans notre CHU, malgré un taux
de récidive élévé, ceci à but didactique et de la maîtrise de nouveau outil
technologique de pointe.
46
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