Craig Anderton Christian Deinhardt © Groupe Eyrolles, 2004, ISBN : 2-212-11358-7 7 Introduction au mixage Vous avez composé un morceau et en avez enregistré les différentes parties. Vous voilà donc prêt à passer à la phase suivante : le mixage, puis le mastering de votre œuvre. Pour les impatients qui ne veulent pas prendre le temps de lire le reste de cet ouvrage, voici un résumé très concis du travail de mixage : réglez les niveaux, les fréquences, le positionnement stéréo ou surround des sons, et ajoutez si besoin des effets pour obtenir un résultat optimal. La présentation pourrait s’arrêter là, si ce n’est que le mixage ne peut se réduire à si peu de choses, tout comme jouer du piano ne se résume pas à enchaîner des combinaisons de touches noires et blanches : tout l’art est en effet de savoir quelles touches enfoncer et quand, et d’avoir suffisamment de technique pour éviter les erreurs. La comparaison avec le mixage est toute faite : vous devez prendre un grand nombre de décisions sur la base d’appréciations le plus souvent subjectives. Quel instrument doit dominer ? Doit-on rendre muets certains passages qui semblent répétitifs ? Doit-on utiliser un son de guitare massif ou plutôt laisser de la place aux autres instruments dans le spectre sonore ? Quelle est l’audience visée ? Pour réussir un mixage, il vous faudra répondre à ce type de questions et allier savamment les aspects artistique (évaluer ce qui juste) et technique (comment produire le son désiré). L’équipe : le producteur, l’ingénieur du son, le musicien Dans un cadre professionnel, le compositeur fait partie d’une équipe partageant un même intérêt pour la musique. À ses côtés, le producteur (ou directeur artistique) et l’ingénieur du son ont un rôle essentiel. Lorsqu’on travaille en home-studio, il est rare de pouvoir s’entourer de telles personnes et vous devrez assumer seul les responsabilités. Bien que la tâche semble malaisée à première vue, l’expérience vous apprendra à devenir objectif envers votre jeu, votre style et vos sons. 112 Mixage et mastering avec Cubase SX/SL 2 Au cours du processus de mixage, il est utile de connaître le rôle de ces trois intervenants afin d’en assurer les fonctions : • Le producteur supervise le travail, gère l’arrangement, juge de l’impact des morceaux et fait des choix artistiques en fonction de ce qu’il estime « marcher » ou non. Pour ce rôle, vous devez envisager chaque morceau comme partie d’une composition globale. L’idée est d’adopter une orientation et de s’y tenir jusqu’au bout. • Le musicien est plus ou moins impliqué dans le mixage, de l’observation pure du travail du producteur à une participation active pour s’assurer que la production reste fidèle à l’intention d’origine. • Lors d’une séance d’enregistrement, celui qui parle peu, ne se plaint pas, ne fume pas et ne boit pas est l’ingénieur du son. Il est chargé d’apporter des réponses techniques aux attentes du producteur, donner davantage de présence à une voix, par exemple. Même s’il s’agit d’un stéréotype, il faut savoir s’investir : au lieu de penser qu’un solo aurait pu être mieux interprété, mettez-vous dans la peau de l’ingénieur du son et contentez-vous de ce dont vous disposez pour le mixage. C’est en assimilant ces rôles que vous poserez différents regards sur votre travail et gagnerez en objectivité. Surtout, ne vous cantonnez pas au mixage de votre musique, produisez-la pour parvenir à un ensemble cohérent. ASTUCE Les débutants font souvent l’erreur de surproduire les morceaux, alors que certaines pistes sonnent parfois mieux sans effet et qu’il ne faut pas hésiter à supprimer des interventions pour libérer de l’espace. Ne faites pas une fixation sur un élément que vous aimez particulièrement dans un titre, écoutez le morceau dans sa globalité. Tel ou tel solo de guitare sert-il votre chanson ou est-il juste là pour démontrer votre vélocité, par exemple ? Cerveau droit et cerveau gauche Nous avons généralement quelques difficultés à passer d’un hémisphère à l’autre. Les musiciens acquiesceront : si l’hémisphère droit est en pleine ébullition, que les idées fusent, mais il suffit qu’un problème technique survienne et sollicite l’hémisphère gauche pour avoir du mal ensuite à retrouver la brillante idée d’origine. Lors d’un enregistrement en studio, l’ingénieur du son fait fonctionner son cerveau gauche et le musicien son cerveau droit (inutile par exemple de se préoccuper des réglages de niveaux), le producteur devant quant à lui jongler entre les deux. Si vous tentez d’endosser tous ces rôles Copyright © 2004 Groupe Eyrolles L’activité du cerveau se répartit dans deux zones distinctes. L’hémisphère gauche assure les tâches analytiques, comme les mathématiques, l’orientation, la lecture, alors que le droit est le siège de la créativité et de l’émotion – il est en cela plus intuitif que rationnel. N’y voyez pas une philosophie New-age au rabais : il suffit de placer des électrodes sur le cerveau d’un sujet pour visualiser quel est l’hémisphère le plus actif en fonction des tâches effectuées. Quel rapport avec le mixage, me direz-vous ? Il est essentiel ! Introduction au mixage CHAPITRE 7 113 simultanément, vous rencontrerez sans doute des difficultés ; si possible, n’hésitez donc pas à vous entourer d’assistants ou de collaborateurs durant le mixage. Toutefois, si vous travaillez seul, vous pouvez dépasser cette dichotomie en vous épargnant toute tâche technique pour ne solliciter ainsi que l’hémisphère droit. Pour y parvenir, vous devrez maîtriser parfaitement Cubase. Les quelques conseils qui suivent devraient vous y aider : Copyright © 2004 Groupe Eyrolles • Apprenez les raccourcis clavier des différentes commandes. Il est en effet plus rapide d’appuyer sur deux touches que de localiser une partie de l’écran, d’y déplacer la souris, de faire défiler un menu, de sélectionner une commande, etc. Cubase permet de créer vos propres raccourcis et de consulter la liste de ceux existants (voir la figure 7-1), ainsi que de générer des macros lançant une série de commandes. Par exemple, créez un raccourci pour supprimer la composante continue d’un fichier audio avant de le normaliser. Figure 7-1 Les raccourcis clavier. ASTUCE Pour créer des raccourcis, en consulter la liste, configurer une macro ou même exporter ou importer vos raccourcis, sélectionnez Fichier>Raccourcis Clavier. 114 Mixage et mastering avec Cubase SX/SL 2 • Servez-vous des configurations de fenêtres (voir la figure 7-2) pour obtenir plusieurs dispositions en fonction des tâches à accomplir : mixage, superposition, travail avec les instruments VST ou encore définition d’effets de départ. Il est beaucoup plus simple de procéder ainsi que d’ouvrir plusieurs fenêtres et de les organiser à chaque fois. Figure 7-2 Configurez les fenêtres en fonction des opérations à réaliser. ASTUCE Vous pouvez à tout moment enregistrer une disposition de fenêtres au moyen de la commande Fenêtres>Configuration des Fenêtres>Nouveau. Attribuez un nom à la nouvelle configuration et cliquez sur OK. Pour plus d’informations sur la configuration des fenêtres, consultez le chapitre 9. Copyright © 2004 Groupe Eyrolles • L’emploi de couleurs et d’éléments graphiques est bien plus parlant pour l’hémisphère droit, plus sensible aux couleurs qu’aux mots. C’est pourquoi il est important de personnaliser l’interface de Cubase en fonction de son propre fonctionnement. Dans Cubase SX, vous pouvez par exemple afficher les contrôles d’égalisation sous forme de barre ou de potentiomètres, selon ce qui vous semble le plus évocateur. Introduction au mixage CHAPITRE 7 115 Émotion et perfection Certains vieux albums enregistrés avec des moyens rudimentaires n’en continuent pas moins à véhiculer des émotions, alors que des morceaux parfaits, techniquement parlant, en deviennent mécaniques, stériles et perdent tout charme. Cette opposition se retrouvent chez les producteurs : certains privilégient l’émotion et font abstraction des éventuelles imperfections dans le jeu des musiciens, d’autres au contraire préfèrent répéter un passage jusqu’à obtenir la prise parfaite. Les deux approches ont leurs avantages et leurs inconvénients et il faut trouver le juste équilibre entre l’autocritique permanente (qui peut déboucher sur l’inhibition) et le laxisme absolu (qui ne demande qu’à se transformer en complaisance). La musique assistée par ordinateur a pour avantage de permettre la sauvegarde d’un nombre illimité de mixages. À la réécoute, vous trouverez peut-être que sur les dix mixages effectués, c’est finalement le premier ou le deuxième qui est le meilleur, ou encore que certains passages seulement sont valables et méritent d’être combinés. Au lieu de travailler dans un éditeur audionumérique avec deux pistes, importez les mixages dans Cubase, effectuez tous les montages souhaités et exportez la nouvelle version ainsi assemblée. L’artiste solo Les difficultés à travailler seul vont bien au-delà de la dichotomie cérébrale évoquée précédemment . Aujourd’hui, une seule personne peut certes composer, jouer, produire, enregistrer, masteriser et même dupliquer son album ; toutefois, rien de tel que de s’entourer de personnes de confiance, capables de formuler des critiques constructives, d’aider à rester en phase avec la réalité, voire de prendre en charge une partie du travail technique. Copyright © 2004 Groupe Eyrolles Nombre de lecteurs ont la chance de pouvoir travailler en collaboration, tandis que certains, pour telle ou telle raison, œuvrent seuls. Rassurez-vous, l’activité en solo n’est pas synonyme d’échecs ; c’est au contraire un immense champ d’expérimentation et de découvertes. Lorsque vous avez l’occasion de travailler avec des ingénieurs du son qualifiés, profitez-en pour en tirer un maximum de choses et mettez-les en pratique une fois seul. Le meilleur conseil pour vous aider à travailler seul est de ne pas tomber amoureux de votre musique. Prenez du recul et donc des décisions objectives, comme le ferait un producteur. Les paragraphes qui suivent offrent des pistes à explorer en la matière. La radio L’introduction d’un titre est primordiale : si un programmateur radio ou un directeur artistique n’aime pas les dix premières secondes de l’une de vos compositions, vous n’avez que peu d’espoir de passer un jour sur les ondes. 116 Mixage et mastering avec Cubase SX/SL 2 Pour tester vos introductions, imaginez une soirée réunissant des personnes de tous âges et niveaux sociaux. Un poste de radio (qui est loin d’avoir la qualité de vos écoutes en studio) assure le fond sonore, et diffuse à un moment donné votre dernière composition. Représentez-vous bien la scène et mettez-vous à la place des invités : comment réagissentils ? Cessent-ils de parler pour écouter ? Écoutent-ils juste les premières mesures avant de reprendre leur conversation ? N’y prêtent-ils aucune attention ? Pour envisager une diffusion radio, vous devez imaginer le morceau dans ce contexte : il doit surgir du néant, susciter l’intérêt et se distinguer. Cet exercice peut aider à identifier ce qui ne fonctionne pas dans un morceau, sachant qu’il doit si possible attirer l’attention de l’auditoire dans les dix premières secondes. Testez vos morceaux en public Le meilleur moyen de tester un morceau consiste à le jouer devant un public (de préférence non-musicien). Vous voyez immédiatement ce qui fonctionne ou pas et savez où améliorer vos compositions. Si vous n’avez pas la possibilité de vous produire, interprétez en solo des morceaux avec un clavier ou une guitare et adaptez-les en temps réel. Cette technique apporte toujours quelque chose d’intéressant. Dans l’une de mes chansons, une partie instrumentale était placée entre un couplet et un refrain et je ne pouvais pas la jouer seul à la guitare. J’ai donc adopté une autre suite d’accords, finalement plus efficace que celle d’origine et permettant une interprétation en live. Même si la tendance s’inverse aujourd’hui, la théorie veut que les chansons naissent en tournée, le studio ne servant qu’à les enregistrer. Une bonne chanson peut ainsi être jouée sans arrangements, simplement sur une guitare ou un clavier. Lorsque vous mixez un morceau, pensez toujours qu’un public est à l’écoute. Vos créations s’en trouveront changées. Un soupçon de finesse S’il est une leçon à retenir des multiples expériences en studio, c’est que tout doit servir l’interprète principal et faire en sorte que chaque arrangement mette en valeur la ligne de chant. Copyright © 2004 Groupe Eyrolles Pour l’anecdote, j’ai un jour composé dans mon coin une partie de basse mélodique, pendant que l’ingénieur travaillait sur le son de caisse claire. J’aimais beaucoup cette mélodie, mais je me suis rendu compte qu’elle détournait l’attention de la ligne de chant – le producteur m’a d’ailleurs demandé de la simplifier. La version que j’ai fini par enregistrer était à la portée d’un débutant, ce qui m’a demandé une bonne dose d’humilité, mais elle a finalement bien mieux servi la chanson. Introduction au mixage CHAPITRE 7 117 Lors du mixage, c’est souvent en coupant telle ou telle partie de l’arrangement qu’on donne un sens à l’ensemble. Ne vous sentez pas obligé d’utiliser la trentaine de pistes enregistrées : moins vous ajoutez d’éléments, et plus l’impact de ceux qui restent est important. Quels sont vos objectifs réels ? Bien entendu, tous ces conseils prennent surtout un sens si un auditoire est visé. Malgré cela, la création musicale est aussi une découverte de soi et c’est ce qui fait son intérêt. Je continuerais de jouer de la musique même si je ne vendais plus un seul CD de ma vie. À mon sens, il n’y a que deux façons de réussir. La première consiste à être parfaitement honnête avec soi-même, en espérant que vos œuvres feront vibrer une corde sensible chez d’autres. C’est en général la philosophie qui fait naître les plus grandes stars, celles dont les carrières durent grâce à l’absence d’artifices. Sans toucher une audience massive, vous restez fidèle à vous-même et vos proches vous en savent gré. L’autre approche revient à étudier attentivement les succès passés, à maîtriser les progressions d’accords qui ont fait recette, à chanter des textes consensuels et à composer pour un auditoire bien ciblé. Dans ce cas, l’activité s’apparente plus à du business qu’à de l’art et peut conduire à un certain succès, plus fugitif et moins satisfaisant sans doute. Dans ce cas, vous devez vous appliquer à créer des chansons commercialement correctes et ajouter beaucoup de compression au mastering (non pas par conviction, mais parce que tout le monde le fait). L’idéal comme toujours est de combiner les deux approches : laissez l’artiste qui est en vous s’exprimer durant la phase de composition, et confiez le mixage et le mastering à votre côté producteur. Cette section visait essentiellement à vous montrer comment gagner en objectivité, sans pour autant banaliser le facteur créatif. Comme souvent dans la vie, c’est la synthèse des contraires qui donne les meilleurs résultats. Lancez-vous et aimez ce que vous faites, mais sans en tomber amoureux. Copyright © 2004 Groupe Eyrolles Réponse en fréquence et audition L’un des buts du mixage et du mastering est d’obtenir un son équilibré, avec des graves plaisants, ronds et précis, des médiums bien définis et des aigus nets, mais pas agressifs. Pour obtenir ce résultat et faire bon usage de l’égalisation, il faut bien comprendre le concept de réponse en fréquence. La réponse en fréquence définit la façon dont un système enregistre ou restitue le spectre des fréquences audibles, qui s’étend de 20 Hz à 20 000 Hz (l’unité Hz ou Hertz mesure le nombre de périodes par seconde d’une onde ; un kilohertz ou kHz équivalant à 1000 Hz). Cette réponse est généralement représentée de façon graphique, l’axe vertical (Y) correspondant au niveau et l’axe horizontal (X) à la fréquence. 118 Mixage et mastering avec Cubase SX/SL 2 Figure 7-3 Ici, la représentation graphique montre une ligne allant de 0 à 20 kHz. Il s’agit d’une réponse plate, car aucune plage de fréquence n’est accentuée ou atténuée. La plage audible est divisée en bandes de fréquences qu’il est possible de répartir comme suit : • Graves – fréquences généralement inférieures à 200 Hz ; • Bas-médium – de 200 à 800 Hz ; • Médium – de 800 à 2,5 kHz ; • Haut-médium – de 2,5 à 8 kHz ; • Aigus – fréquences supérieures à 8 kHz. Bien qu’approximative, cette classification sert de référence : une basse et une grosse caisse se situent par exemple dans les graves, une voix dans le médium et le bas-médium, et les percussions, comme un tambourin par exemple, génèrent beaucoup d’énergie dans les aigus. Les séances de mixage prolongées et à haut volume sonore sont pénibles pour les oreilles. Par conséquent, mixez à faible niveau afin d’éviter toute fatigue auditive, et de mieux saisir les variations subtiles de l’intensité sonore. Le fait de mixer fort est souvent plus gratifiant, mais Copyright © 2004 Groupe Eyrolles Contrairement aux appareils électroniques (amplificateurs haute-fidélité, par exemple), les dispositifs mécaniques possèdent rarement une courbe de réponse plate. Celle d’un hautparleur chute souvent dans les fréquences graves et aiguës. Celle des micros de guitare présente souvent un creux dans les aigus, ce qui explique pourquoi les amplificateurs de guitares rehaussent les médiums aigus. Introduction au mixage CHAPITRE 7 119 comporte des inconvénients, car la perception des sons par l’oreille n’est pas linéaire. Un véritable « limiteur interne » entre alors en fonction, et peut fausser complètement les perceptions. De la même façon, comme la courbe de réponse de l’oreille est fonction du niveau sonore, un mixage ou un mastering à trop faible niveau risque de trop amplifier les basses et les aigus. Mixez à un niveau d’écoute confortable et vérifiez ensuite à un niveau élevé et faible pour trouver le juste équilibre. Écoute et acoustique Tous les efforts consentis lors du travail d’enregistrement et de mixage sont vains si votre système d’écoute ne restitue pas fidèlement le son. Et les enceintes ne sont pas le seul élément déterminant : entrent aussi en ligne de compte vos oreilles, l’acoustique de la pièce, l’amplificateur et le câblage. C’est l’interaction de tous ces éléments qui déterminela précision de ce que vous entendez, et par conséquent celle du mixage et du mastering. Si un mix sonne parfaitement chez vous mais mal ailleurs, c’est que vous avez des problèmes d’écoute. Les problèmes d’oreille Copyright © 2004 Groupe Eyrolles Pour commencer, vos oreilles sont l’élément le plus important de votre système d'écoute, sans pour autant être parfaites, en raison du phénomène représenté par la courbe de FletcherMunson. Pour rester simple, la courbe de réponse des oreilles présente une bosse dans le médium et des creux dans les graves et les aigus, surtout à faible volume. Ce n’est donc qu’à un niveau d’écoute élevé que la réponse se rapproche d’une courbe plate. La touche Loudness des amplificateurs hi-fi sert à compenser ce phénomène en amplifiant les graves et les aigus à bas niveau et en aplatissant la réponse à mesure que vous montez le potentiomètre de volume. Nombreux sont les facteurs externes pouvant endommager vos oreilles outre la musique forte : consommation excessive d’alcool, plongée en eau profonde, vieillissement, éventuellement voyages en avion (dans mon cas, j’évite toute tâche requérant une écoute précise, mixage par exemple, dans les 24 heures qui suivent un vol). Notez également que les ingénieurs du son professionnels souffrent fréquemment d’un creux dans les médiums après une exposition trop prolongée et trop fréquente à des volumes sonores trop élevés. Le conseil vous est familier, alors appliquez-le : prenez soin de votre audition pour que vos oreilles ne soient la faille de votre système dd’écoute. Lorsque je tournais beaucoup, avec plus de 200 concerts par an, je mettais du coton dans mes oreilles. Même s’il existe aujourd’hui des bouchons spéciaux bien plus efficaces, cette astuce a sauvé mon audition et il m’arrive encore de porter ces protections vendues dans le commerce : pour me promener, aller à un concert, bricoler avec un marteau ou des outils bruyants ou rester dans un endroit où le niveau de déci- 120 Mixage et mastering avec Cubase SX/SL 2 bels dépasse celui d’une conversation. Comme moi, faites de la protection de vos oreilles une priorité. Les autres variables La pièce dans laquelle vous travaillez influence aussi la façon dont vous mixez. Pour vous en rendre compte, munissez-vous d’un sonomètre, asseyez-vous au milieu de la pièce, diffusez un son test basé sur une onde sinusoïdale glissante et observez le résultat de la mesure. À moins de posséder d’excellentes écoutes et que la pièce ait un traitement acoustique, l’indicateur oscillera comme une feuille en pleine tempête. Certes les enceintes n’offrent pas, par elles-mêmes, une courbe de réponse parfaitement linéaire, mais comparée à celle de l’acoustique d’une pièce standard, celle-ci semble plate comme une limande. Inutile de recourir à un sonomètre pour cet autre test : diffusez un signal d’une fréquence de 5 kHz environ, à niveau constant, et bougez la tête. Vous notez de nettes fluctuations de volume (pensez à vous reconvertir dans la peinture si vous ne percevez pas une fréquence de 5 kHz). Ces variations s’expliquent par les multiples rebonds du son sur les murs : ces réflexions créent des annulations ou des ajouts qui s’intègrent au son global. Figure 7-4 Cette illustration montre un phénomène d’onde stationnaire. L’onde se réfléchit sur le mur en opposition de phase avec l’onde originale, ce qui provoque une annulation. À d’autres fréquences, la réflexion pourrait au contraire renforcer l’onde sonore originale. Ces anomalies de la réponse en fréquence affectent la perception du son. Mur Mur Enceinte Onde d'origine Onde réfléchie Réponse résultante Sol Comme les murs, sols et plafonds interagissent avec les enceintes, et il est important de positionner les haut-parleursde façon symétrique dans la pièce. Si l’un se trouve à trente centimè- Copyright © 2004 Groupe Eyrolles Par ailleurs, la position des enceintes est aussi déterminante. Sachez par exemple qu’à proximité d’un mur les basses augmentent, car tous les sons qui émanent de l’arrière ou de l’avant des enceintes (les graves étant très peu directionnels) rebondissent sur le mur. Comme la longueur d’onde des graves est élevée, la réflexion a tendance à renforcer l’onde principale. L’explication est un peu schématique, mais le principe est là. Introduction au mixage CHAPITRE 7 121 Figure 7-5 Le fait de placer une enceinte contre un mur augmente souvent artificiellement le niveau des graves. Dans un coin, l’effet est pire encore. Mur Enceinte Onde d'origine Onde réfléchie Réponse résultante Sol tres du mur et l’autre à trois mètres, la recombinaison des réflexions sonores est différente pour chacun, ce qui affecte la courbe de réponse. La question du traitement acoustique d’une pièce mérite un livre entier. Même si elle n’est abordée que sommairement ici, vous devez en comprendre le rôle en matière de mixage. Si vous êtes fortuné, vous pouvez toujours recruter un professionnel pour préparer votre local à l’aide de bass traps (absorbeurs de fréquences graves) ou d’autres dispositifs mécaniques similaires (cette tâche est différente de l’optimisation acoustique d’une salle par égalisation). Il m’est impossible de vous donner des conseils spécifiques dans ce domaine, car chaque pièce est différente. Copyright © 2004 Groupe Eyrolles ASTUCE Certains tentent de compenser les défauts de la pièce en plaçant un égaliseur graphique juste avant l’amplificateur de puissance et en travaillant l’égalisation pour retrouver un son neutre. Le problème est que la courbe change dès que vous vous éloignez même légèrement de l’endroit où les mesures de correction ont été effectuées. Par ailleurs, il est inutile d’égaliser fortement une pièce si elle n’est pas traitée sur le plan acoustique. De même que la réduction de bruit fonctionne mieux avec des signaux qui contiennent peu de souffle, l’égalisation « électronique » d’une pièce n’est probante que dans des conditions de départ assez favorables. Écoutes de proximité Dans les cabines de mixage des grands studios d’enregistrement, de grosses écoutes sont encastrées dans le mur avant, à bonne distance de la console (2 ou 3 mètres environ). La cabine est évidemment traitée pour obtenir l’acoustique la plus neutre possible et son « point idéal » (sweetspot) correspond à l’emplacement du siège de l’ingénieur du son lors du mixage. 122 Mixage et mastering avec Cubase SX/SL 2 Dans les studios plus petits, les écoutes de proximité sont devenues un standard. Elles sont généralement placées à un ou deux mètres de la personne qui mixe, sa tête et les haut-parleurs formant ainsi un triangle équilatéral. Figure 7-6 Les écoutes de proximité doivent être orientées vers les oreilles de la personne qui mixe, à la même hauteur. Si elles sont à un niveau légèrement supérieur, il faut les incliner vers le bas. Ingénieur du son Point idéal Les écoutes de proximité réduisent, sans l’éliminer, l’impact de l’acoustique de la pièce, leur son direct l’emportant sur les réflexions. De plus, leur proximité épargne un fonctionnement à haut régime et réduit la puissance requise pour les amplificateurs placés en amont. L’idéal est de disposer d’uneun surface importante, et d’éloigner les enceintes de plus de deux mètres des murs. Si vous manquez de place, montez les enceintes à courte distance du mur sur la table accueillant la console et à recouvrez si possible le mur de matériaux à fort pouvoir absorbant. Vous n’êtes pas encore au bout de vos peines, car si vous posez vos enceintes sur le bandeau de la console elle-même, cette dernière provoque des réflexions, sources d’imprécisions. Pour résoudre ce problème, placez les écoutes de proximité de part et d’autre de la console, sur Copyright © 2004 Groupe Eyrolles Ne sous-estimez pas néanmoins la place de ces écoutes dans la pièce : trop près d’un mur, les graves sont excessifs. Et bien qu’il soit possible de compenser ce phénomène à l’aide d’un égaliseur (ou éventuellement de sélecteurs sur les enceintes elles-mêmes), la correction nécessaire varie selon les fréquences. Les médiums et les aigus sont effectivement moins affectés car plus directionnels. Si les enceintes sont posées sur pied à faible distance du mur, les réflexions peuvent entraîner des creux ou des bosses dans la courbe de réponse, pour les raisons mentionnées précédemment. Introduction au mixage CHAPITRE 7 123 pied, légèrement en hauteur. Le son voyage ainsi plus ou moins directement des haut-parleurs aux tympans. Anatomie d’une écoute de proximité Il existe un grand nombre d’écoutes de proximité de tailles et prix variables. La plupart disposent de deux voies et possèdent un boomer de 15 ou 20 centimètres et d’un tweeter plus petit. À première vue, un modèle à trois voies avec un haut-parleur pour les médiums peut sembler plus adapté, si ce n’est que l’ajout d’une source sonore peut compliquer encore le réglage de l’acoustique. Préférez un système deux voies bien conçu à un système trois voies moyen. Les écoutes se divisent en deux grandes familles que sont les passives et les actives. Les écoutes passives ne sont composées que de haut-parleurs et de filtres répartiteurs et requièrent un amplificateur externe. Les écoutes actives intègrent quant à elles un filtre dont les sorties alimentent un amplificateur par haut-parleur.. J’ai une préférence pour ces dernières : leur conception même permet d’optimiser les amplificateurs internes en fonction des caractéristiques des haut-parleurs utilisés, d’ignorer les problèmes de câblage, et de prévoir des dispositifs de sécurité en cas de surcharge. Les enceintes actives deux voies sont le plus souvent biamplifiées : autrement dit, elles disposent d’un double système d’amplification (un pour chaque haut-parleur), ce qui permet de réduire les distorsions liées à l’intermodulation et de régler finement la fréquence de raccordement et la réponse en fréquence de chaque hautparleur. Pour un moindre coût, vous pouvez sans problème brancher des écoutes passives à votre amplificateur, en vérifiant qu’il dispose de la réserve dynamique appropriée (headroom). Si ce n’est pas le cas, tout écrêtage génère en effet des harmoniques hautes fréquences (demandez aux guitaristes qui emploient des distorsions) qui, à forte dose, endommagent les tweeters. Copyright © 2004 Groupe Eyrolles Quelle est la meilleure écoute ? Sur Internet, vous avez toutes les chances de tomber sur des discussions quant aux meilleures écoutes de proximité. Dans la pratique, l’idée est de trouver celles qui conviennent le mieux à votre espace de travail et à la courbe de réponse, imparfaite, de vos oreilles. Bien souvent, vous lirez des articles affirmant qu’un modèle d’enceintes « met en évidence des détails jamais perçus auparavant avec d’autres enceintes ». Rien d’étonnant à cela, quand on sait que même les meilleures enceintes ne possèdent pas une courbe de réponse parfaitement plate. Par conséquent, elles mettent certaines fréquences en avant, d’autres en retrait, dans des régions du spectre différentes d’autres enceintes. En fait, elles font percevoir le mixage différemment. Ce vieux conseil reste valable : rien de mieux que d’écouter plusieurs enceintes pour faire votre choix. Sachant que le système d’écoute parfait, idéalement neutre, n’existe pas, optez pour celui qui colore le son à votre goût. 124 Mixage et mastering avec Cubase SX/SL 2 Le choix des écoutes est donc tout un art. Ayant eu la chance d’écouter ma musique sur des systèmes très onéreux et proches de la perfection, que ce soit dans de grands studios ou des structures de mastering, je sais comment elle doit sonner. Mes critères de choix sont simples : muni de « mon » CD test, je cherche les écoutes dont le son est le plus proche des systèmes très haut de gamme que j’ai pu écouter. Si vous n’avez pas la même opportunité que moi, réservez 30 minutes dans un très bon studio et apportez vos disques préférés (vous parviendrez sans doute à négocier le prix étant donné que vous n’utilisez presque pas de matériel). Écoutez vos CD et notez comment ils doivent sonner, puis prenez cette référence au moment de l’achat. Par exemple, si le piano de votre mix est un peu en retrait en studio, cherchez des écoutes reproduisant le même phénomène. Attention toutefois : dans le cadre d’une écoute comparative A/B, veillez bien à ce que le niveau sonore des deux systèmes d’enceintes que vous comparez soit identique (au dixième de décibel près). En effet, il est prouvé qu’en l’absence d’un tel alignement, ce sont toujours les enceintes produisant le niveau sonore le plus élevé qui donnent l’impression d’une meilleure qualité. Pour que la comparaison soit valide, cet alignement des niveaux est donc indispensable. Enfin, avant de faire votre choix, sachez que les enceintes contiennent des aimants, lesquels peuvent déformer l’affichage des moniteurs cathodiques utilisés en informatique. Si vous pensez placer un écran à proximité des écoutes (pour faire de la postproduction, par exemple), choisissez un modèle blindé, ou à écran plat. Apprenez à connaître vos écoutes et l’acoustique de la pièce Vous savez déjà que votre situation d’écoute ne peut être parfaite ; familiarisez-vous alors avec la réponse de votre système. Supposons qu’un mixage semble parfait chez vous, mais comporte trop de graves lorsque vous l’écoutez en studio professionnel : c’est sans doute que votre environnement de travail absorbe les graves, et que vous êtes amené à les pousser pour compenser, un problème classique dans les petits studios. À l’avenir, vous saurez donc qu’il faut, chez vous, mixer avec peu de graves pour qu’ailleurs, ils sonnent normalement. Vous devez également définir un volume d’écoute standard. Je suis partisan du monitoring à des niveaux faibles pour préserver mes oreilles, mais aussi parce que quelque chose sonnant bien à bas volume est encore mieux plus fort. En raison de la courbe de Fletcher-Munson, vous risquez cependant d’exagérer les graves et les aigus. Avant de valider un mix, écoutezle à différents niveaux. Si, écouté fort, il semble contenir légèrement trop de graves et d’aigus et, écouté doucement, en manquer un tout petit peu, vous êtes sur la bonne voie. Copyright © 2004 Groupe Eyrolles Effectuez également des comparaisons au niveau des médiums et des aigus. Si les voix sont très présentes sur votre système mais en retrait sur d’autres, vos enceintes accentuent trop les médiums. Compensez par conséquent en creusant un peu vos mixages dans cette plage de fréquences. Introduction au mixage CHAPITRE 7 125 Casques, enceintes hi-fi et systèmes à satellites Pour des raisons budgétaires, les musiciens ont souvent recours au mixage au casque car une centaine d’euros suffit à se procurer du matériel de qualité, chose impossible pour des écoutes. Sans mixer exclusivement au casque, il est toujours bon d’en avoir un sous la main, à condition qu’il ne soit pas ouvert (ses oreillettes communiquent avec l’extérieur) mais fermé. Avec un casque, vous pourrez parfois mieux percevoir les graves que sur un système d’écoute de proximité. Attention là encore à votre audition, car elle peut facilement se détériorer sans qu’on s’en rende compte. Vérifiez les vumètres et prenez garde aux larsens, qui peuvent être, au casque, suffisamment forts pour provoquer des dommages irréversibles à votre système auditif. Voici une petite anecdote à propos des enceintes haute fidélité. Pendant 15 ans, j’ai mixé avec ce qu’on appelle, en hi-fi, des « enceintes de bibliothèque » : les écoutes les moins séduisantes du monde, mais elles étaient neutres, plates et surtout j’avais appris à les connaître en réécoutant mes mixages dans des studios professionnels. Les tests sur des enceintes onéreuses étaient toujours concluants, car conformes à mes attentes, à ceci près que les signaux inférieurs à 50 Hz disparaissaient purement et simplement sur mon système. Avec les instruments qui descendent très bas, comme les grosses caisses d’orchestre, je devais mixer visuellement à l’aide des vumètres et toujours vérifier le résultat ailleurs. Depuis, j’ai fait l’acquisition de vraies écoutes de proximité qui descendent jusqu’à 30 Hz. Copyright © 2004 Groupe Eyrolles Optez pour des enceintes hi-fi si vous n’avez pas d’autre solution, mais vérifiez leur neutralité. Méfiez-vous des modèles grand public qui accentuent souvent les graves et les aigus, et pensez que ce matériel n’est souvent pas conçu pour fonctionner à niveau d’écoute élevé. Autre astuce, sauf indication contraire du fabricant : placez-les horizontalement, tweeters vers l’extérieur. Vous bénéficierez ainsi d’une meilleure image stéréo. On trouve désormais des systèmes d’écoute triphoniques, dont les satellites faisant office d’écoutes de proximité sont de taille très réduite – si réduite qu’ils ne peuvent reproduire correctement les graves. Certains puristes feront remarquer qu’aucun « boomer » de 15 ou 20 cm de diamètre ne peut raisonnablement prétendre produire un niveau élevé dans les graves, mais il est parfois nécessaire de faire des compromis entre coût, encombrement et lois de la physique... Ces systèmes triphoniques font donc appel à un subwoofer, ou caisson de graves, enceinte acoustique spécialisée, de dimensions respectables, chargée de reproduire exclusivement le bas du spectre (en dessous de 120 Hz ou 80 Hz, par exemple). Ce caisson contient un amplificateur, et se pose généralement directement sur le sol. Dans une certaine mesure, son emplacement n’est pas critique, puisque les fréquences graves sont peu directionnelles. Un système à satellites permet-il alors d’obtenir un son correct sur votre ordinateur ? Oui. Si la place est comptée, constitue-t-il une solution d’écoute hi-fi intéressante ? Oui. Pouvez-vous mixer vos projets importants sur ce type d’écoute ? Personnellement, je ne le ferais pas. Peutêtre arrive-t-on à s’habituer, mais j’éprouve personnellement des difficultés à mixer avec ces graves qui semblent venir de nulle part. 126 Mixage et mastering avec Cubase SX/SL 2 Tester un mixage sur plusieurs systèmes J’ai pour habitude de me méfier de la neutralité des écoutes et de tester mes mixages sur plusieurs systèmes avant de les valider. Écoutez votre travail sur un autoradio stéréo, sur des enceintes de chaîne hi-fi, sur de grosses écoutes de studio, sur des haut-parleurs d’ordinateur, au casque, etc. Si votre mixage sonne bien à chaque fois, félicitations ! S’il est en revanche trop agressif avec cinq systèmes sur huit, vous avez intérêt à atténuer un peu les aigus. Même si le mastering permet des corrections, le mixage doit être aussi parfait que possible avant d’aborder cette phase. Nombre de grands studios sont équipés de grosses enceintes encastrées, d’écoutes de proximité et de haut-parleurs de qualité moyenne pour savoir comme sonne un mix sur un système lambda. Le passage d’un système d’écoute à l’autre permet de déceler les dernières imperfections et de les corriger. La courbe d’apprentissage Si vous avez l’impression qu’un long parcours vous attend avant de parvenir à de bons mixages, vous avez parfaitement raison. Privilégiez d’abord votre audition, analysez ensuite l’acoustique de la pièce, puis intéressez-vous aux écoutes. Une fois que vous avez trouvé un emplacement satisfaisant sur le plan acoustique pour vos enceintes, n’en changez plus ! Ce n’est qu’alors que vous pourrez commencer à « apprendre » votre écoute, à compenser mentalement les anomalies dans la réponse en fréquence de l’ensemble local + enceintes. Plus vous écouterez, mieux vous éduquerez votre oreille, mais en contrepartie, plus vous deviendrez dépendant des enceintes que vous utilisez. Certains producteurs emportent même leurs enceintes préférées en séance, pour les comparer à celles du studio dans lequel ils vont travailler. L’avantage de la démarche est que même si vous ne pouvez pas vous offrir le système d’écoute idéal, vous maîtriserez suffisamment le vôtre, et serez en mesure de réaliser des mixages satisfaisants sur des équipements très différents, l’objectif d’un mix réussi. Plug-ins : les outils de mixage et de mastering Il existe deux technologies de plug-in : celle déléguant les calculs nécessaires au processeur de l’ordinateur lhôte (native) et celle qui confie ces calculs à un matériel externe (hardware). Les plug-ins non natifs ne tournent qu’avec certaines cartes informatiques DSP, spécialisées dans le traitement de signaux numériques. Tel est le cas par exemple de la série UAD-1 de Universal Audio/Mackie, du plug-in PowerCore de TC Work ou des effets et synthétiseurs Copyright © 2004 Groupe Eyrolles Steinberg est l’inventeur du concept VST (Virtual Studio Technology) grâce auquel la console de mixage et tous les effets et processeurs d’un studio sont regroupés dans un environnement informatique. Le format de plug-in VST est multi-plate-forme (compatible Mac OS et Windows), sachant que sur PC, Cubase prend également en charge les plug-ins Microsoft DirectX. Introduction au mixage CHAPITRE 7 127 Pulsar XTC de Creamware. Les plug-ins natifs ne font appel à aucun équipement particulier, puisque c’est l’ordinateur lui-même qui s’occupe des traitements. La puissance de traitement requise du processeur est proportionnelle au nombre de plug-ins natifs lancés (notamment s’il s’agit de synthétiseurs virtuels). Pour s’affranchir de cette limite physique afin d’employer davantage de plug-ins, seules deux solutions s’offrent à vous : acheter un processeur plus rapide ou augmenter la latence du système (temps requis pour le traitement des signaux). Avec la seconde option, vous réduisez la charge de travail du processeur mais augmentez le temps de réaction du système lorsque vous déplacez les faders, que vous jouez les instruments virtuels, etc. Le processus de mixage Plus qu’un art, le mixage est votre dernière occasion de décider comment votre musique va rendre. Un bon mix peut sublimer vos compositions, un mauvais réduire vos efforts à néant. Un mixage efficace doit mettre en valeur les éléments importants, ménager quelques surprises pour étonner l’auditeur et bien sonner sur n’importe quel système, du simple transistor à la chaîne hi-fi très haut de gamme. Il n’est pas facile d’assembler plusieurs pistes pour obtenir un morceau cohérent. C’est pourquoi le mixage requiert la même expérience et le même niveau de créativité que toute autre phase du processus musical. Voyons à quoi tient la difficulté d’un bon mixage, en commençant par déterminer ce qu’il doit contenir. Les différents modes de mixage Des multiples façons d’obtenir un fichier mixé dans Cubase SX/SL 2, voici les techniques les plus courantes. Copyright © 2004 Groupe Eyrolles Exporter un fichier mixé depuis Cubase La technique la plus simple consiste à tout régler comme vous le désirez (égalisation, niveaux, panoramiques, données d’automatisation, etc.). Lorsque le mix ainsi obtenu vous convient, sélectionnez Fichier>Exporter>Mixage Audio et rendez le fichier final dans l’un des formats possibles, avec la résolution et le taux d’échantillonnage qui vous conviennent. Les fichiers se divisent en deux grandes familles : • Les fichiers au format WAV, WAV Broadcast et AIFF peuvent ensuite être importés dans des logiciels de gravure de CD-Rom ou des applications d’édition audio. • Les fichiers au format MP3, Ogg Vorbis, Real Audio et Windows Media Audio utilisent des algorithmes de réduction de débit numérique des données (on utilise souvent le terme erroné de « fichiers compressés »), ce qui peut dégrader le son. Étant moins volumineux, 128 Mixage et mastering avec Cubase SX/SL 2 ils peuvent plus facilement être diffusés sur le Web ou insérés dans des projets multimédias. Un fichier WAV de 40 Mo ne « pèse » plus que 4 Mo en version MP3, par exemple, soit une réduction du volume de données de 10 à 1. ATTENTION Ne confondez pas « compression de données numériques » (le terme exact est réduction de débit numérique de données), qui réduit la quantité de données contenues dans un morceau, et compression audio, qui restreint la plage dynamique d’un signal. Notez également que les formats de « compression de données » proposés dans Cubase sont destructifs : vous ne pouvez pas décompresser les données et revenir à l’original, car les données qui ont été supprimées en vue de réduire la taille du fichier restent perdues à jamais. Mixer sur une bande analogique Certains ingénieurs du son disent que les magnétophones analogiques réchauffent le son grâce aux distorsions inhérentes à la bande magnétique et préfèrent parfois ce support. Dans Cubase, cette tâche est aisée : il suffit d’affecter la sortie maître à deux sorties analogiques de l’interface audio et de les relier aux entrées analogiques du magnétophone. Vous pouvez également passer par des sorties numériques à condition d’intercaler un convertisseur numérique/analogique entre la carte son et le magnétophone. Les professionnels préfèrent en général mixer sur des bandes larges défilant à grande vitesse (par exemple, 12,7 mm de largeur défilant à 76 cm/s). Au-delà de l’éternelle controverse entre analogique et numérique, le résultat obtenu avec une bande magnétique défilant à 76 cm/s reste d’une qualité indéniable et, associé à un système de réduction du bruit Dolby SR, l’analogique n’a rien à envier au numérique. Mixer directement en numérique Dans ce cas de figure, vous connectez la sortie numérique de l’interface audio (S/PDIF ou AES/EBU, le plus souvent) directement à l’entrée numérique d’un enregistreur de CD autonome, d’une machine DAT, d’un MiniDisc ou d’un autre ordinateur. INFO Prenez bien ce qui suit en considération : • Les projets Cubase, l’interface audio et le périphérique de mixage doivent afficher la même valeur de fréquence d’échantillonnage, généralement de 44,1 kHz pour les CD, Copyright © 2004 Groupe Eyrolles Le S/PDIF est considéré comme un standard audionumérique grand public, mais il est abondamment utilisé chez les professionnels. Il en existe deux variantes : la première, coaxiale, transporte les données sous forme électrique via un câble terminé par des connecteurs RCA (cinch), tandis que la seconde transporte les données sous forme optique, via une fibre terminée par des connecteurs TOSLink. Le format numérique AES/EBU reprend la structure des données S/PDIF, en plus sophistiqué ; le signal est transporté sous forme électrique, via une liaison symétrique – le câble se terminant le plus souvent par deux connecteurs XLR. Introduction au mixage CHAPITRE 7 129 32 kHz pour la diffusion numérique radio ou télé et 48 kHz pour les vidéos. Le son Surround et les autres contenus audio haute résolution utilisent des fréquences d’échantillonnage allant jusqu’à 96, voire 192 kHz. Cependant, le CD étant le support le plus répandu, c’est la fréquence d’échantillonnage de 44,1 kHz qui est la plus utilisée. • L’appareil numérique sur lequel vous mixez doit être configuré comme esclave du signal d’horloge de l’interface audio. Vous êtes ainsi assuré qu’il se synchronise sur le signal de contrôle numérique (wordclock) émis par la sortie numérique. Si la source de signal numérique et l’enregistreur sont tous deux configurés comme maîtres, le conflit se manifestera sous forme de petits bruits parasites dans le meilleur des cas, voire des problèmes de hauteur de son ou même des coupures. Le manuel de votre périphérique de mixage doit contenir des informations relatives à la configuration de son horloge. Mixer sur un magnétophone numérique via des connexions analogiques Le numérique permet un transfert parfait, même si certains préfèrent intercaler des outils de mastering analogiques entre la sortie de l’ordinateur et l’entrée du périphérique de mixage, tels que le fameux Spectral Processor 740 de Dolby ou un modèle vintage comme l’égaliseur Pultec. Pour les utiliser, vous devez disposer d’une interface audio avec des sorties analogiques et d’un enregistreur disposant d’entrées de même nature afin d’éviter une conversion supplémentaire via un convertisseur analogique/numérique. Mixer dans Cubase via une console analogique ou numérique On l’oublie souvent, mais rien n’empêche d’envoyer plusieurs bus provenant de Cubase vers les entrées d’une console analogique ou numérique, puis d’enregistrer simultanément la sortie des généraux de la console sur deux pistes dans Cubase. Cette technique présente certains avantages, vous pouvez notamment : Copyright © 2004 Groupe Eyrolles • Insérer des effets analogiques au niveau de la console (réverbération externe de haute qualité, par exemple) ou y connecter des processeurs de mastering analogiques. • Employer les égaliseurs de la console à la place de ceux de Cubase pour réduire la charge de travail du processeur. • Déplacer les faders et tourner les potentiomètres en temps réel lors du mixage, ce qui vous donne certains des avantages d’une surface de contrôle. • Sauvegarder, lors de l’enregistrement du projet Cubase, les pistes sources ainsi que le mixage final. Pour plus d’informations sur l’envoi de sorties de Cubase vers une console physique, consultez le chapitre 26. 130 Mixage et mastering avec Cubase SX/SL 2 Avant de mixer La préparation du mixage commence dès l’enregistrement. Une partie du travail consiste à obtenir le signal le plus propre possible. Pour cela, éliminez le plus possible d’étages électroniques actifs entre la source et l’enregistreur. En effet, même s’il n’est pas utilisé (mode Bypass), tout périphérique inutilisé risque de générer du souffle ou de dégrader légèrement le signal. Essayez toujours d’envoyer le son directement sur l’interface audio, en évitant de passer inutilement par une console ou un préamplificateur. Pour les signaux au niveau micro, préférez aux préamplis intégrés d’une console un préampli externe et haute qualité, directement rélié à la carte son. Enfin, attachez-vous à capter un son aussi naturel que possible : vous gagnerez forcément en clarté, notamment si les pistes commencent à s’accumuler. L’arrangement Avant même de penser à toucher un potentiomètre, examinez soigneusement l’arrangement de votre morceau. Les projets réalisés en solo sont souvent très chargés, car on a tendance à combler les vides à l’enregistrement des premières pistes. Or, plus l’arrangement avance, moins il reste de place pour d’autres parties musicales. Voici quelques suggestions d’organisation des pistes, qui faciliteront le mixage ultérieur : • Une fois que l’arrangement a pris corps, revenez en arrière et refaites toutes les pistes déjà enregistrées mais trop chargées. Essayez de jouer le moins de notes possible, afin de laisser de la place aux éléments supplémentaires déjà enregistrés, que vous avez conservés. Il m’est parfois arrivé de réenregistrer intégralement un titre après avoir fini son mixage, ou après l’avoir joué plusieurs fois sur scène. Comme beaucoup, je compose en studio, et les titres ainsi obtenus semblent parfois légèrement hésitants, manquant d’assurance. Recommencer l’enregistrement d’un titre semble toujours aller dans le sens de la simplification et de l’amélioration. Le mixage : un programme en 12 étapes Un mix se construit par petites touches, avec au moins 12 étapes importantes qui interagissent. Si vous modifiez l’égalisation d’une piste (sa couleur tonale), par exemple, vous en Copyright © 2004 Groupe Eyrolles • Dans le cas de morceaux où la voix prédomine, essayez de construire l’arrangement autour du chant au lieu de terminer la partie rythmique, puis d’y caser la voix. Par expérience, il est souvent plus efficace de n’enregistrer que des « repères » rythmiques à la batterie, puis de passer directement à la voix. En revenant ensuite à l’arrangement batterie, vous constaterez combien vous êtes beaucoup plus attentif aux nuances vocales. Introduction au mixage CHAPITRE 7 131 changez également le niveau car certains éléments constitutifs du son viennent s’ajouter ou disparaissent. En cela, le mixage s’apparente à une sorte de cadenas à combinaison puisque ce n’est qu’une fois tous les éléments en phase qu’il est réussi. Passons en revue ces 12 étapes, sachant que le choix est subjectif et que d’autres méthodes de travail peuvent davantage vous convenir. Étape 1 : préparation mentale et organisation Connaissant la dose de concentration que le mixage demande et la fatigue qu’il peut engendrer, organisez votre espace de travail d’une façon ergonomique. Dans cette optique, les options de Configuration des Fenêtres (voir la figure 7-7) se révèlent très utiles puisqu’elles permettent de passer d’un affichage à un autre en quelques clics. Figure 7-7 Copyright © 2004 Groupe Eyrolles Enregistrez des configurations de fenêtres via le menu Fenêtre. Vous pouvez également laisser ouverte la boîte Organiser les Fenêtres (en cochant la case Garder la Fenêtre Ouverte après Activation) et cliquer sur le bouton Nouveau. Cette fenêtre sert aussi à activer ou supprimer des affichages. Procédez comme suit pour enregistrer une configuration : 1. Positionnez les fenêtres comme vous l’entendez (Instruments VST, par exemple). 2. Sélectionnez Fenêtre>Configuration des Fenêtres>Nouveau. 132 Mixage et mastering avec Cubase SX/SL 2 3. Intitulez la configuration Instruments VST, par exemple. 4. Cliquez sur OK. Pour rappeler une disposition de fenêtres, sélectionnez Fenêtre>Configuration des Fenêtres et cliquez sur celle souhaitée. L’option Organiser permet en outre de créer, d’activer ou de supprimer des affichages. INFO Les configurations mémorisent uniquement les fenêtres ouvertes et leurs emplacements respectifs. Aussi ne permettent-elles pas, par exemple, d’enregistrer l’affichage des égaliseurs d’une console et celui des effets de départ d’une autre. Quelle que soit votre méthode de travail, faites des pauses régulières (toutes les heures, par exemple) pour reposer vos oreilles et reprendre avec plus de fraîcheur. Quelques minutes suffisent à retrouver de l’objectivité et, paradoxalement, à travailler plus vite. Étape 2 : passer les pistes en revue Optez pour un volume d’écoute modéré et familiarisez-vous avec les pistes, en vérifiant que toutes portent un nom et en identifiant celles pour lesquelles vous devrez éventuellement modifier les effets activés. Regroupez les sons de façon logique en faisant glisser les pistes dans la liste des pistes (voir la figure 7-8) : vous placerez par exemple tous les éléments de batterie côte à côte ou dans une même piste répertoire. Étape 3 : traquer les bruits parasites avec un casque La suppression des bruits parasites est typiquement une activité associée à la partie gauche du cerveau, contrairement à l’hémisphère droit qui s’acquitte plutôt des tâches créatives. Sachant que faire la navette d’un hémisphère à l’autre nuit à la créativité, occupez-vous du nettoyage des pistes avant de passer au mixage en supprimant craquements, clics, fausses notes et autres parasites. Dans les pistes audio, traquez les bruits parasites situés avant et après les interventions musicales : bruit de manipulation de micro si le chanteur le tient à la main, ronflette d’ampli, corde qui vibre à vide, bruits de bouche quand l’interprète se prépare à chanter, etc. Aussi faibles soient-ils, ces bruits constituent rapidement une gêne lorsque multipliés par une dizaine de pistes. Dans Cubase, l’édition audio est aisée et d’une grande précision. Double-cliquez sur un événement audio pour ouvrir l’éditeur d’échantillons. À partir de là, vous pouvez zoomer sur Copyright © 2004 Groupe Eyrolles Je vous conseille d’écouter intégralement chaque piste en solo. Dans les pistes MIDI, cherchez les notes en double qui créent des effets de chorus et supprimez celles qui se chevauchent, comme dans les pistes de basse ou d’autres instruments monophoniques. Introduction au mixage CHAPITRE 7 133 Figure 7-8 Copyright © 2004 Groupe Eyrolles La figure de gauche montre un affichage désorganisé, où quatre pistes MIDI de batterie cohabitent : grosse caisse, une caisse claire, des percussions et un charley. Ce dernier ayant été enregistré après la basse et la piste de synthétiseur, il se trouve en bas de la liste, au lieu d’accompagner les autres éléments de batterie. Par ailleurs, la piste de synthétiseur A1 a été convertie en audio, mais l’original MIDI a été conservé dans l’éventualité de modifications.La figure de droite montre les mêmes pistes, mais après réorganisation. Toutes les pistes de batterie MIDI ont été regroupées dans une piste répertoire. Une autre piste de ce genre, tout en bas de l’affichage pour ne pas gêner, a été créée pour stocker les pistes MIDI d’origine. Cette organisation crée également une disposition plus logique des voies de la console. la forme d’onde et éliminer les parasites un à un à l’aide de l’outil Crayon, ou sélectionner une région et appliquer un traitement audio à l’ensemble (Silence, Fondu d’Entrée, Fondu de Sortie, Normaliser, etc.) via le menu Audio>Traitement. Les fondus sont particulièrement utiles pour supprimer les clics numériques générés par les découpes en début ou fin d’événement (voir la figure 7-9). Parfaitement audibles en solo, les « trous » sonores ainsi créés passeront sans doute inaperçus s’ils tombent sur un temps fort et que d’autres pistes sont lues en même temps. Étape 4 : convertir les pistes de synthétiseur virtuel en audio Si vous travaillez avec des instruments VST via MIDI, envisagez leur conversion en piste audio (via la fonction Geler Instrument) afin de soulager le processeur et réserver ses ressources aux effets de mixage. Vous pourrez ainsi remplacer une réverbération de qualité moyenne par une autre plus professionnelle, mais plus gourmande en ressources. Les pistes audio obtenues via la fonction Geler Instrument sont enregistrées dans un dossier invisible et 134 Mixage et mastering avec Cubase SX/SL 2 Figure 7-9 Il est très facile de se débarrasser de clics numériques. Ouvrez l’événement audio dans l’éditeur d’échantillons, sélectionnez la zone à supprimer et choisissez Audio>Traitement>Silence. procurent ainsi plus de mobilité, car il est inutile de toujours disposer des mêmes instruments virtuels pour les exploiter. Pour en savoir plus, reportez-vous au chapitre 23 qui traite du mixage et du MIDI. Étape 5 : trouver un équilibre relatif entre le volume des différentes pistes Étape 6 : régler l’égalisation L’égalisation sert à souligner les différences de timbre entre lesinstruments, et à créer un son global plus équilibré. Commencez par travailler les éléments les plus importants du morceau (voix, batterie et basse), et une fois que ces trois parties fonctionnent bien ensemble, commencez à intégrer dans le mixage les parties secondaires. L’égalisation est traitée en détail au chapitre 8. Copyright © 2004 Groupe Eyrolles Finis les préparatifs, le temps est venu de mixer. N’ajoutez aucun traitement pour l’instant et concentrez-vous sur le son global des pistes, sans vous laisser distraire par des détails. Je vous conseille de commencer par régler les niveaux en mono. Si les instruments se distinguent déjà bien dans ce mode, ils ne le feront que mieux encore en stéréo. En commençant directement en stéréo, vous risquez de ne pas vous rendre compte que certaines parties entrent en conflit. Introduction au mixage CHAPITRE 7 135 Sachez que même si le spectre audio est très étendu (environ 10 octaves), il faut veiller à ce que chaque son n’occupe que la place qui lui revient, sans rivaliser avec d’autres. Attention, les traitements appliqués à une piste peuvent en affecter d’autres parties. Par exemple, les médiums « gonflés » d’une guitare risquent d’empiéter sur les voix, le piano ou les autres instruments se situant dans ce registre. De la même façon, si vous choisissez de monter les aigus sur le son de basse afin de gagner en précision sur de petites écoutes, prenez garde à ne pas noyer les cordes graves de la guitare rythmique. Il arrive en effet qu’une fréquence amplifiée sur un instrument doive être atténuée sur d’autres instruments, pour libérer de la place. Les chanteurs ou les auteurs-interprètes commettent souvent l’erreur de penser d’abord à se mettre en avant dans le mix (quoi de plus naturel ?) avant de s’occuper de « détails » comme la batterie. Celle-ci couvre pourtant une grande part du spectre audio, des graves de la grosse caisse aux aigus des cymbales, et la tendance contemporaine est de mixer les rythmiques de plus en plus en avant et de laisser les voix un peu en arrière. C’est pourquoi il est parfois préférable de commencer par mixer la batterie, puis de repérer les « trous » dans lesquels placer les autres instruments. Si la grosse caisse est dominante, la place risque d’être insuffisante pour la basse : dans ce cas, amplifiez la basse dans les fréquences comprises entre 800 et 1 000 Hz pour faire remonter l’attaque et lui redonner un peu de brillance. Comme la grosse caisse se trouve en dehors de cette plage, les deux instruments peuvent cohabiter sans souci. Imaginez votre morceau sous forme de spectre sonore et déterminez où y placer les différents instruments, ainsi que la hiérarchie à respecter. Étape 7 : ajouter les traitements de signaux importants Les traitements importants sont ceux qui modifient radicalement le son, comme une distorsion, un vocodeur ou un écho « calé » sur le tempo et modifiant, à ce titre, le feeling rythmique du morceau. Si vous ne changez pas d’avis entre-temps, le son « avec écho » fera certainement partie du mixage final et, pour cette raison, l’effet doit être pris en compte lors du mixage avec les autres instruments. Copyright © 2004 Groupe Eyrolles Étape 8 : définir les placements stéréo Intéressez-vous à présent aux curseurs de panoramique, et placez les instruments dans l’image stéréo, soit d’une façon traditionnelle en tentant de reproduire la spatialisation en conditions de concert, soit créative. Placez les instruments mono en des endroits précis, en évitant les extrémités droite ou gauche : diffuser les sons sur une seule enceinte en stéréo les fait manquer de corps. ASTUCE Dans Cubase SX 2, les curseurs de panoramique sont toujours visibles dans les tranches de la console de voies, qu’elles soient en visualisation large ou étroite. Le curseur est également accessible dans l’onglet Voie et dans les paramètres généraux de l’inspecteur pour les pistes audio. 136 Mixage et mastering avec Cubase SX/SL 2 Comme les sons graves sont moins directifs que les aigus, les ingénieurs du son placent généralement les grosses caisses et les basses au centre (sauf les basses de synthétiseur stéréo). Autre avantage : l’énergie acoustique de cette base rythmique est générée à part égale par les deux enceintes, ce qui lui confère plus d’impact. Pensez également à l’équilibre des fréquences : si vous avez placé un charley (qui contient beaucoup d’aigus) à droite, envoyez les tambourins, shakers ou autre percussions aiguës à gauche. Même remarque pour les instruments médiums. Vous pouvez également fabriquer une « fausse stéréo », l’aide d’un égaliseur graphique. Copiez le signal mono d’origine de manière à le placer sur deux voies, puis appliquez uneégalisation distincte sur chacune de ces voies (voir la figure 7-10). Si vous disposez d’un plugin d’égaliseur graphique stéréo, coupez les bandes de fréquences paires sur l’un des canaux et les bandes de fréquences impaires sur l’autre. Voici deux exemplaires d’une même piste mono d’origine, chacune comportant un égaliseur graphique activé, issu de la carte XTC Creamware. Les égaliseurs sont configurés de manière à ce que les atténuations et les amplifications des différentes bandes de fréquences soient identiques mais complémentaires d’une piste à l’autre, ce qui permet de créer une « fausse stéréo » à partir de signaux mono. N’oubliez pas de vous servir des curseurs de panoramique pour placer les deux voies. Copyright © 2004 Groupe Eyrolles Figure 7-10 Introduction au mixage CHAPITRE 7 137 Cette technique ne fonctionne pas bien avec les instruments dont le spectre ne couvre qu’une plage de fréquences limitée, comme la voix ou certains sons de synthétiseurs lead. En revanche, appliquée à un morceau couvrant plusieurs octaves ou sur un son de boîte à rythmes, elle peut créer des images stéréo surprenantes. Le placement stéréo a une forte incidence sur la perception des sons. Faites l’expérience avec une voix et son doublage (partie rechantée en suivant aussi fidèlement que possible la voix principale). Placez les deux voix à l’opposé, puis au centre. C’est au milieu que le son est plus doux, ce qui peut atténuer les défauts d’un chanteur moyen. À l’inverse, deux voix aux extrêmes offrent un son plus net, mieux défini, et mettent en valeur un bon chanteur. Étape 9 : apporter les dernières modifications à l’arrangement Comme le disent nos amis anglo-saxons, « Less is more » – ce qui pourrait traduire par « Moins il y en a, mieux c’est », adage qui se révèle très pertinent en matière de mixage. Réduisez au maximum le nombre de pistes concurrentes pour éviter l’encombrement de l’espace sonore et faciliter l’écoute. C’est le moment de se débarrasser de tout ce qui n’est pas directement utile au morceau. À l’inverse, si vous trouvez qu’il manque encore quelque chose à votre arrangement, c’est la dernière opportunité d’ajouter un ou deux éléments. Pour apporter une dimension créative à votre mixage, n’hésitez pas à faire apparaître ou disparaître des éléments à un moment donné (voir la figure 7-11). Cette optique, proche du « remix », est très en vogue en dance music, où il n’est pas rare que les arrangements fassent intervenir des boucles rythmiques courant tout le long du morceau, que l’ingénieur du son n’hésite pas à couper brutalement, à filtrer, à faire passer par des changements de niveaux radicaux. ASTUCE Bien que Cubase permette d’automatiser la fonction Rendre muet, vous pouvez également rendre une piste muette en cliquant en bas de la zone de course de son fader (juste au-dessus de l’indicateur numérique de niveau). Copyright © 2004 Groupe Eyrolles Étape 10 : architecte des sons Comme un architecte, créez un espace à l’aide de réverbérations et de délais pour donner une profondeur acoustique à un son plat. C’est lors de cette phase que vous ajoutez des traitements audio –l’équivalent, en mixage, des épices en cuisine. Vous opterez souvent pour une réverbération globale afin de simuler un volume donné (club, salle de concert, auditorium). Une autre réverbération est envisageable à titre d’effet, avec un programme particulièrement brillant sur la caisse claire par exemple, ou un programme de reverbération « gate » sur les toms. Aux débuts de l’enregistrement, en règle générale la réverbération était à peine audible et servait à recréer un environnement acoustique. Aujourd’hui, les réverbérations sont devenues 138 Mixage et mastering avec Cubase SX/SL 2 Figure 7-11 Vous pouvez à tout moment réduire les niveaux. Cliquez ici pour remettre instantanément le niveau à zéro. si sophistiquées qu’elles génèrent des sons uniques, qui sont aussi inséparables du morceau que les parties instrumentales. Attention toutefois à ne pas noyer les sons dans la réverbération : si vous l’appliquez pour masquer des défauts dans une piste, réenregistrez-la. Une mauvaise prise reste une mauvaise prise, sous n’importe quelle dose de fard. Étape 11 : affiner, encore et toujours Le mixage est à présent en bonne voie : il reste à l’affiner. Si vous aimez l’automatisation, commencez à programmer vos mouvements de faders, sans jamais oublier l’interaction entre les étapes précédentes. Naviguez entre les égalisations, les niveaux, les panoramiques et les effets jusqu’à obtenir ce que vous recherchez et restez critique. Si vous laissez un problème de côté, vous le regretterez par la suite, à chaque écoute du mix. Étape 12 : vérifier le mixage sur différents systèmes d’écoute Avec un home studio, vous avez la chance de pouvoir laisser reposer un mixage et d’y revenir le lendemain avec une oreille plus fraîche. Vous aurez entre temps testé l’ensemble sur différents systèmes d’écoute, afin de les dernières retouches à apporter. C’est là que l’automatisation prend tout son intérêt : si tout est parfait sauf un petit détail qui vous chagrine, vous pouvez intervenir dans les données d’automatisation pour résoudre le problème. Il est crucial de poursuivre le mixage jusqu’à ce que le résultat vous convienne parfaitement. Il n’y a en effet rien de pire que de réécouter un travail réalisé six mois auparavant et de Copyright © 2004 Groupe Eyrolles Avant de valider votre mixage, vérifiez-le sur différents systèmes d’écoute : si votre travail sonne bien sur tous, vous avez accompli votre mission. Introduction au mixage CHAPITRE 7 139 regretter de ne pas avoir pris le temps de corriger tel ou tel problème, ou encore de découvrir une erreur passée inaperçue dans l’urgence du moment. Une mise en garde toutefois : ne tombez pas dans l’extrême inverse en travaillant excessivement votre mix. J’ai eu une fois l’occasion d’interviewer Quincy Jones, aux dires duquel l’enregistrement et le sequencing avec des synthétiseurs revient à « essayer de peindre un 747 avec des cotons-tiges ». Un mixage est toute une performance ; si vous abusez du perfectionnisme, vous perdez la spontanéité qui peut en faire le piment. Préférez un mixage qui n’est pas irréprochable mais qui véhicule une émotion, à un autre d’une perfection stérile. Ne réenregistrez pas vos mix les uns sur les autres ; il se peut qu’en réécoutant une des premières versions du mixage le lendemain, vous décidiez que c’est la « bonne ». À la longue, vous ne serez peut-être plus capable de vraiment faire la différence entre différentes versions d’un mix. Un producteur m’a un jour confié avoir fait une dizaine de mixages d’une même chanson, en apportant chaque fois de légères modifications qui lui semblaient importantes sur le moment. En réécoutant l’ensemble quelques semaines après, il ne pouvait plus dire ce qui distinguait un mix d’un autre. Évitez donc de perdre du temps avec des choses trop subtiles. Copyright © 2004 Groupe Eyrolles Une fois le mixage idéal « dans la boîte », n’hésitez pas à enregistrer des mixages supplémentaires : version instrumentale ou sans solos par exemple. Ils peuvent s’avérer très utiles par la suite, si vous avez la chance d’intégrer votre musique à la bande son d’un film ou devez en créer une version longue, par exemple.